Quelques jours avant Pâques, c’est une trêve que se sont accordés les fabricants mondiaux de chocolat, actuellement en pleines opérations de fusions et acquisitions. Le 16 mars, ils ont décidé d’enterrer la hache de guerre en promettant un plan d'action commun contre la déforestation, qu’ils dévoileront lors de la COP23, en novembre à Bonn (Allemagne). Ont répondu à l’appel lancé par l'organisation caritative du prince Charles, le suisse Nestlé, numéro un mondial de l’agroalimentaire, l’américain Mondelez, champion du chocolat et des biscuits, son concurrent Mars ou encore le leader français du chocolat Cémoi. A leurs côtés, des représentants de Côte d'Ivoire et du Ghana, qui réalisent à eux deux plus de la moitié de la production mondiale de cacao. Car la déforestation, en mettant en péril la pérennité du secteur du cacao, menace aussi la survie de millions de petits producteurs.
La chute des cours du cacao… après une envolée pendant dix ans
Depuis novembre 2016, les producteurs ivoiriens sont d’ailleurs particulièrement inquiets. Ils disent ne plus parvenir à écouler leur récolte, en raison d'un excédent mondial de 264 000 tonnes de cacao prévu pour la saison 2016-2017, qui a aussi fait chuter les cours début mars à leur niveau le plus bas depuis trois ans. Or les prix minimum d'achat fixés par le gouvernement ivoirien ne sont plus respectés, assurent ces planteurs. Ils ont annoncé le 5 avril porter plainte contre le Conseil ivoirien du café-cacao, chargé de la régulation et de la stabilisation de la filière, pour "ses dérives et l'opacité de sa gestion".
Début mars, la filière française du commerce équitable avait d’ailleurs tiré la sonnette d’alarme sur l’impact de cette chute des cours pour l'avenir des petits producteurs et les risques de grave tension sociale en Côte d'Ivoire, premier producteur mondial de cette fève. Reste qu’entre 2006 et 2016, les cours du cacao ont explosé de 109% alors que l’inflation répercutée par les entreprises du secteur a été limitée à 6,5%, selon Nelly Bonnet, la responsable Economie des filières et marchés au Syndicat français du chocolat, qui représente les acteurs traditionnels du secteur. Ces derniers ont aussi travaillé avec la filière ivoirienne pour l'aider à se professionnaliser et se pérenniser. Matière première onéreuse, à plus de 2 000 euros la tonne, le chocolat enregistre néanmoins à long terme une progression de sa consommation mondiale, rappelle Nelly Bonnet.
Gaëlle Fleitour