En zone euro, la relance budgétaire s'annonce au mieux modeste

par John Geddie
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LONDRES (Reuters) - Les appels lancés aux gouvernements de la zone euro en faveur d'une augmentation de la dépense publique pour soutenir la croissance ne semblent pas avoir été entendus pour l'instant, au vu des estimations d'émissions de dettes publiques pour 2017.

Commerzbank, Morgan Stanley et ING prévoient ainsi que les émissions d'obligations des 19 Etats de la région augmenteront de 20 à 40 milliards d'euros, un montant faible qui ne répond en rien aux incitations de la Commission européenne à relâcher la pression budgétaire et à mettre un bémol à l'austérité.

Principale explication à cette quasi-absence de réaction: la montagne de dettes accumulée pendant et après la crise financière continue de limiter les marges de manoeuvre de la plupart des Etats et le seul qui pourrait se permettre sans difficulté d'augmenter ses dépenses, l'Allemagne, continue de donner la priorité à l'équilibre de ses comptes publics.

"C'est l'éternel problème de la zone euro", résume Benjamin Schroeder, stratège d'ING. "Là où on a besoin de dépenses, le niveau d'endettement est vraiment élevé, et là où on n'a pas besoin de dépenses, les coffres sont pleins."

Parmi les pays très endettés qui ont détaillé leurs intentions en matière d'émissions pour 2016, la Belgique a revu à la baisse son estimation initiale et prévoit désormais d'emprunter moins qu'en 2016.

Pour l'ensemble de la zone euro, ING table sur une augmentation de 20 milliards d'euros des émissions totales, à 885 milliards environ; Morgan Stanley prévoit une hausse de 27 milliards à 876 milliards et Commerzbank une hausse de 40 milliards à 900 milliards.

UNE RELANCE SERAIT SANS EFFET TANGIBLE IMMÉDIAT

Les deux principales économies de la région, la France et l'Allemagne, devraient préciser leur programme dans les semaines à venir, l'Italie et l'Espagne en janvier.

Si la modération semble rester de mise, le besoin de soutien budgétaire à la croissance n'a visiblement jamais été aussi important, au point que le président de la Banque centrale européenne (BCE), Mario Draghi, a appelé à plusieurs reprises les gouvernements à jouer leur rôle en complément de la politique monétaire très accommodante qu'il pilote.

Pour Anton Heese, responsable de la stratégie taux de Morgan Stanley en Europe, même si certains gouvernements se montrent plus généreux en 2017, plusieurs années pourraient être nécessaires pour que les dépenses publiques supplémentaires aient un impact sensible sur la croissance ou sur le montant des émissions obligataires.

"Même si un gouvernement s'engage à une certaine expansion budgétaire, à moins qu'il y ait beaucoup de projets prêts à démarrer, l'augmentation effective des émissions peut s'étaler sur une période longue", dit-il.

A ses yeux, la principale difficulté tient au fait que l'UE ne sanctionne que les pays qui ne respectent pas des critères de rigueur budgétaire stricts, alors qu'elle n'a aucun moyen permettant de favoriser la dépense.

Les ministres des Finances de la zone euro ont rejeté au début du mois une proposition de la Commission visant à fixer un objectif chiffré de soutien budgétaire pour 2017.

DES MARGES DE MANOEUVRE LIMITÉES

Certaines banques semblent toutefois plus optimistes que d'autres en la matière.

"L'accent sera mis sur l'augmentation de la dépense budgétaire l'an prochain à l'approche des élections en Europe. La période d'austérité budgétaire est révolue", prédit ainsi Robert McAdie, responsable de la recherche et de la stratégie "Global Markets" de BNP Paribas. "Je m'attends à ce que les émissions augmentent."

L'année 2017 sera marquée entre autres dans la région par des élections législatives aux Pays-Bas mi-mars, la présidentielle française en mai puis les législatives allemandes en septembre.

BNP Paribas prévoit de publier ses estimations d'émissions 2017 fin décembre ou début janvier.

Mais à moins d'un revirement de l'Allemagne, qui a équilibré son budget en 2014 pour la première fois en 45 ans et tient à maintenir cet équilibre, il semble peu probable d'assister à un effort marqué de relance budgétaire ailleurs.

Commerzbank estime qu'une fois déduite la dette existante à refinancer, 90% des nouvelles émissions de la zone euro serviront à financer les déficits budgétaires français, italien et espagnol.

Et pour bon nombre de pays, les souvenirs de la crise sont sans doute encore trop vivaces pour ouvrir à plein le robinet budgétaire.

"Je doute qu'il y ait beaucoup de marges de manoeuvre si on considère la situation avec une certaine distance", a déclaré la semaine dernière l'ex-président de la BCE Jean-Claude Trichet.

"Il est un peu étrange de se lancer dans des recommandations comme celle-là quand on sait que la crise de 2008 a été provoquée par le surendettement et qu'il y a eu une crise de la dette souveraine."

(Avec Dhara Ranasinghe; Marc Angrand pour le service français, édité par Véronique Tison)

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