Edouard Philippe lance le chantier d’une "véritable stratégie nationale portuaire"
Au Conseil interministériel de la mer de Dunkerque jeudi 15 novembre, le Premier Ministre a décrit les contours d’une stratégie portuaire nationale. Il a annoncé la fusion des trois ports du Havre, de Rouen et de Paris (aujourd’hui liés par un GIE) dans un établissement public et le renforcement de l’intégration des ports de l’axe Méditerranée Rhône et du système portuaire de l’axe Nord.
"Il n'existe pas en France, alors même que nous sommes un des plus grands pays maritimes de l'Union Européenne, de stratégie portuaire", a déclaré Edouard Philippe à l’issue du Comité interministériel sur la mer qui se tenait à Dunkerque (Nord). Le gouvernement va donc "préparer une véritable stratégie nationale portuaire" a-t-il ajouté, "pour orienter les politiques d’investissement et faire en sorte que nous ne soyons pas laissés sans direction commune dans cette compétition avec d'autres grands ports". Allusion à des ports "redoutablement bien organisés et capables de jouer de l’ensemble de la gamme des instruments publics dans les pays où ils sont situés".
L’idée principale qui sous-tend la réforme portuaire du gouvernement est celle de "faire passer les grands ports maritimes d’un modèle
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de ports aménageurs à un modèle de ports entrepreneurs". Pour que ces ports soient davantage tournés vers la conquête de trafics, Edouard Philippe annonce notamment une " stabilisation du régime fiscal" s’appliquant aux grands ports maritimes, établissements publics de l’Etat. Ces ports sont aujourd’hui au nombre de sept - Marseille, Le Havre, Dunkerque, Rouen, Nantes, Bordeaux et La Rochelle - mais le Premier Ministre a redit jeudi 15 novembre son souhait de voir Nantes, Bordeaux et La Rochelle passer sous pavillon régional, comme il l’avait indiqué il y a un, lors des Assises de la mer au Havre.
Le gouvernement a prévu d’aller vite sur le chantier fiscal des ports. "D’ici le début de 2019, nous aurons établi une doctrine fiscale claire et totalement harmonisée au niveau national", a annoncé le chef du gouvernement. Objectif, "préciser les biens qui sont, ou non, soumis à la taxe foncière". Sur la question du fonctionnement des ports, Edouard Philippe a tenu à affirmer que son gouvernement s’engageait à "compenser la totalité des charges de dragage" - dépenses d’entretien des ports – un engagement pris en 2016 par l’Etat et non tenu, a-t-il observé.
Fusionner Le Havre, Rouen, Paris dans un établissement public
Edouard Philippe est par ailleurs revenu sur son souhait de "renforcer les systèmes portuaires de l’axe Nord, de l’axe Seine et de l’axe Méditerranée-Rhône/Saône", sujet également évoqué il y a un lors des Assises de la mer au Havre.
L’annonce la plus spectaculaire et qui risque de créer de l’émoi sur les quais - notamment à Rouen, où l’on a toujours la crainte d’être avalé par le géant havrais - concerne le système portuaire de la vallée de Seine organisé depuis 2012 en un GIE (groupement d’intérêt économique) baptisé HAROPA (pour Le Havre, Rouen, Paris). Le gouvernement a en effet, décidé de "fusionner trois ports, du Havre (premier port français de conteneurs, Ndlr), de Rouen et de Paris dans un établissement public qui sera doté de trois implantations territoriales". Cet établissement public doit être "opérationnel au plus tard le 1er janvier 2021" a annoncé le Premier Ministre. « Il est temps de passer à une intégration plus poussée qu’Haropa » a souligné Edouard Philippe. La finalité, a-t-il expliqué est de « disposer d’une réelle unité de commandement et de stratégie sur tout le grand bassin parisien afin de créer un ensemble de la taille des autres ports du range Nord » (façade Manche Mer du Nord, Nldr).
Cette annonce ne constitue pas une surprise pour les trois ports. Aux Assises de la mer en novembre 2017, l’ex député-maire du Havre avait souligné qu’HAROPA avait "atteint ses limites". Il avait appelé à "plus d’intégration » entre les trois places portuaires de l’axe Seine et réclamé « un pilotage beaucoup plus unifié entre les trois ports". Il avait chargé François Philizot, délégué interministériel au développement de la vallée de la Seine, d’un rapport sur le sujet. Dans ce rapport remis en février 2018 au Premier Ministre, mais non rendu public, le préfet préconisait un pilotage direct pour Haropa avec la création d’un EPIC de tête dont dépendraient les ports du Havre, de Paris et de Rouen.
"Le GIE reste aujourd’hui pour l’essentiel à la main des trois ports", avait confié François Philizot à l’Usine Nouvelle en juin 2018. Certes, la réunion des trois ports de l’axe-Seine au sein du GIE HAROPA a permis de "constituer une marque commerciale commune" mais elle n’a pas permis de "développer une politique commerciale intégrée, une stratégie d’investissement et des tarifs communs".
Sur l’axe Nord, créer un conseil de coordination portuaire
Concrètement, si la marque Haropa est désormais connue dans le monde entier, le GIE n’a pas de pouvoir de décision sur la stratégie des trois ports. Chaque place portuaire porte ses investissements, a ses tarifs et gère son foncier. Et pour cause ! Ses revenus sont assis sur les droits de ports et les volumes de marchandises qui passent par ses installations.
Sur l’axe Nord, premier point de passage européen entre l’Europe continentale et le Royaume Uni, Edouard Philippe a annoncé la création d’un "conseil de coordination interportuaire" associant les ports et Eurotunnel afin que les structures portuaires "travaillent mieux ensemble". Objectif, disposer d’une "instance de dialogue constante entre les ports sur la sécurité et les systèmes de suivi des marchandises". Pour le système portuaire Méditerranée Rhône Saône, le projet est de créer un GIE réunissant les ports de Marseille, Sète, Toulon, Port la Nouvelle, Nice et Ports-Vendres. Objectif, améliorer la coordination sur l’innovation, la réparation navale, la recherche de nouveaux trafics.
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