[Édito] Lubrizol : un point d’étape trois ans après
L'accident Lubrizol à Rouen, en 2019, a donné lieu à une refonte de neuf textes réglementaires. Pour aider les industriels à se mettre en conformité, France Chimie participe à une action collective, le PLIS.
C’était il y a trois ans, le 26 septembre 2019, un incendie d’envergure se déclarait dans les locaux de l’usine Lubrizol, à Rouen. Sans faire de victimes, un panache de fumée et de suie s’était répandu sur la ville et à des kilomètres à la ronde. Au total, 9 000 tonnes de produits entreposés avaient brûlé dont 60 % chez Lubrizol et 40 % chez son voisin, Normandie Logistique, en raison d’un effet domino entre ces installations mitoyennes.
Si les conséquences sanitaires restent controversées, Lubrizol aura mobilisé les pouvoirs publics et contribué à la refonte de neuf textes réglementaires autour de trois grands sujets : les obligations des sites Seveso, les entrepôts et les contenants mobiles de matières combustibles. Ainsi, parmi les nouveautés, les plans d’opération internes (POI) seront désormais obligatoires pour les sites Seveso seuil bas, tandis que les seuils haut devront en programmer tous les ans – et non pas tous les trois ans. Par le jeu des nomenclatures, de nombreux entrepôts vont entrer dans le champ de la réglementation. Les récipients mobiles fusibles – de type fûts en plastique ou GRV – voient leur usage revisité pour les liquides inflammables et combustibles. Mais on retrouve également la nécessité d’inventorier tous ses stocks et de mettre des documents simplifiés à disposition du grand public, ou encore l’obligation de réaliser des études de danger sur des produits de décomposition susceptibles d’être émis en cas d’incendie. À noter au passage, la création d’un Bureau d’enquêtes et d’analyses (BEA) du risque industriel et une augmentation du nombre d’inspection des installations classées.
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Le PLIS : Une aide à la mise en conformité réglementaire
Dans la foulée, l’industrie chimique, représentée par France Chimie, a promis d’investir 450 millions d’euros pour déployer cette réglementation postLubrizol dont l'application va s’échelonner jusqu’en 2026. À cet effet, elle vient de lancer le PLIS (Plan logistique industrie et sécurité). Il s’agit d’une action collective, déployée par le GICPER (Groupement des industries chimiques pour les études et la recherche), sous l’égide de France Chimie et avec le soutien du ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires qui contribue au financement. Au programme, un site Internet, des tutoriels, quatorze vidéos, un logiciel d’autodiagnostic à destination des entrepôts et issu des travaux de la Normandie, et un accès à tous les textes applicables ou documents de l’administration. Des outils pratiques et concrets, mis à la disposition des adhérents de France Chimie, dont une bonne partie est proposée en accès libre.
Cependant, s’il faut se féliciter de ces avancées réglementaires pour une meilleure protection de l’homme et de l’environnement, ne nous voilons pas la face : c’est un casse-tête réglementaire qui se profile avec plus de 1 000 pages de textes et de guides techniques. Mais les industriels n’auront pas le choix. De l’avis du ministre en charge de l’Ecologie : « La sécurité des sites industriels est globalement satisfaisante mais plusieurs sites font l’objet d’incidents, d’accidents réguliers ou de non-conformités ». Aussi, pour nous préparer à toutes les menaces possibles, tant les accidents industriels que les pollutions ou les catastrophes naturelles (inondations, feux de forêt, séismes, tempêtes…), le ministère lance la « Journée nationale de la résilience », qui aura lieu chaque 13 octobre. Des exercices pratiques seront déployés sur tout le territoire pour nous préparer au pire. L’initiative est aussi pertinente que glaçante. Je vous laisse en juger.