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Écocéane met le cap sur la haute mer
Paimpol : son port de plaisance pittoresque, ses vieux morutiers... Et ses technologies de dépollution innovantes. Le chantier naval Ecocéane, niché dans l'arrière-port, est spécialiste du ramassage des hydrocarbures en mer grâce à un procédé breveté. Avec 70 de ses navires Cataglop déjà vendus à travers le monde, elle occupe déjà le marché portuaire. À présent, cette PME de trente salariés monte en gamme avec son nouveau modèle hauturier : le Workglop 128. Son fondateur Robert Gastaldi, installé derrière son bureau qui surplombe le petit chantier, ne cache pas ses ambitions : « Notre objectif, c'est de conquérir le marché mondial de la dépollution en haute mer ».
Une aspiration en double flux
Car dans le monde de la dépollution, Écocéane se positionne en empêcheur de ramasser en rond. « Notre procédé recueille entre 30 et 80 m3 d'hydrocarbure à l'heure quand les concurrents plafonnent à 5 m3/h », claironne Robert Gastaldi. Cet ancien entrepreneur du BTP s'est inspiré des décanteurs à hydrocarbures obligatoires dans les stations-service. « Il suffisait de transposer un tel système en mer », souligne-t-il. Écocéane s'est ainsi créé en 2002 sur l'idée d'un catamaran, dont l'hélice assure en même temps la propulsion et l'aspiration de l'eau polluée. Cette charge transite par un bac décanteur situé dans la coque. Les hydrocarbures de faible densité s'y accumulent en surface tandis que l'eau est évacuée en poupe. « Les bateaux de dépollution classiques utilisent des « sweeping arms », des sortes de bras mécaniques pour balayer les hydrocarbures et les pomper dans la foulée. Mais ce mouvement turbulent provoque une émulsion d'eau et d'hydrocarbure. Pour les re-séparer, il faut chauffer le mélange sur place. C'est un procédé lent et énergivore », détaille Robert Gastaldi. La subtilité du procédé Écocéane : éviter ce phénomène parasite d'émulsion grâce à un système d'aspiration en double flux (voir schéma).
Le petit Cataglop, 7 mètres taillés pour les zones portuaires, voit le jour en 2007. « Avant de résorber les marées noires en haute mer, il fallait commencer par un projet plus modeste pour valider le concept », justifie Robert Gastaldi. Il y a trois ans, Écocéane passe à la conception assistée par ordinateur en 3D, avec le logiciel Catia de Dassault Systèmes. Elle adopte le module Shipbuilding, consacré à la construction navale. Investissement lourd, mais pari réussi : « Le logiciel Autocad, que nous utilisions jusque-là, nous permettait seulement de réaliser des plans en 2D sans lien dynamique entre eux. La moindre modification devait être répercutée sur chaque vue du bateau. À l'inverse, Catia nous sort de véritables maquettes numériques, peut générer n'importe quelle vue en coupe, et intègre les propriétés des matériaux », s'enthousiasme Benjamin Lerondeau, le jeune architecte naval qui a impulsé l'adoption du logiciel.
Les bienfaits de la maquette numérique
Finies, les améliorations empiriques. Les ingénieurs peuvent désormais mettre en oeuvre leurs concepts de façon dynamique. Dans la foulée, la carène des Cataglops a reçu un lifting hydrodynamique, une seconde jeunesse pour sa mobilité et son procédé de ramassage à la clé. Autre avantage de la modélisation dynamique : la possibilité de lister automatiquement chaque pièce composant la structure. « Avec ces plans de débits, le sous-traitant nous retourne un devis dans la demi-journée. Il fallait une semaine auparavant », explique Benjamin Lerondeau en déroulant les pièces sur son écran d'un glissé de souris. Le chantier a donc modifié sa stratégie pour monter en cadence. Il se consacre désormais à l'assemblage et sous-traite l'usinage des pièces. Dans l'atelier, entre deux gerbes de soudage, les ouvriers manipulent la maquette numérique via un terminal informatique pour vérifier l'agencement des pièces. « La maquette nous permet d'échanger entre la R&D et l'atelier de façon beaucoup plus claire, conclut Benjamin Lerondeau. C'est autant d'erreurs de fabrication évitées ».
Fort de cette modernisation en conception comme en production, Ecocéane conçoit désormais des bateaux de dépollution pour la haute mer. Premier enfant de la conception 3D, Spillglop est devenu, avec ses 18 mètres, le navire amiral d'Écocéane. Il intervient comme démonstrateur de dépollution sur différents lieux sinistrés. Le WorkGlop 128, dont les 13 mètres de carène ont libéré leurs cales le 27 septembre 2011, s'annonce maintenant comme le fer de lance commercial de la société. Capable de ramasser jusqu'à 80 m3/h d'hydrocarbure à la vitesse de 4 noeuds, ce navire d'une autonomie de quatre jours intègre un bras de travail mécanique pour réaliser des tâches annexes. Cette nouvelle caractéristique permet au navire de sortir des flottes de dépollution condamnées à la cale sèche en l'absence de sinistre et de faire désormais jeu égal avec les bateaux utilitaires.
UN NAVIRE DE 18 MÈTRESFleuron de la R&D d'Écocéane, le Workglop 128 a été inauguré en septembre. La société a redimensionné la coque et le système de récupération des hydrocarbures pour travailler en haute mer. Autre apport : un bras de mécanique pour le transport de marchandises.
UNE CONCEPTION EN CAO 3DLes six ingénieurs R&D produisent les maquettes numériques sur le logiciel de CAO Catia. Grâce au module Shipbuilding, dédié à la conception navale, ils peaufinent l'hydrodynamique des coques en continu.
UN ASSEMBLAGE PLUS RAPIDECôté atelier, la maquette numérique conditionne la construction sans passer par le plan papier. Le chantier a réorienté son métier vers l'assemblage pour augmenter la cadence de production, tandis que l'usinage des pièces est sous-traité.
ÉCOCÉANE EN BREF SPÉCIALISTE DES BATEAUX DE DÉPOLLUTION EN MER- Créée en 2002 - Siège social à Paris - Bureau d'études et chantier naval à Paimpol - Effectif 30 personnes - Chiffre d'affaires 4 millions d'euros en 2011, 15 millions prévus en 2012 - 70 navires de dépollution côtière déjà vendus à l'international
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