Drones civils : pourquoi il faut simplifier les règles en Europe
Alors qu'une réglementation européenne des drones civils est en cours de préparation, il faut d'ores et déjà harmoniser et simplifier les règles actuelles. C'est le constat établi par Ozan Akyurek, spécialiste en contentieux commercial-droit des affaires au sein du cabinet d'avocats Jones Day. Toute la difficulté consiste pour les autorités à concilier sécurité et souplesse, comme le montre la comparaison des réglementations française et britannique.
Crédits : David Rodriguez Martin - Flickr - CC
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Inventés à l’origine par et pour les militaires, l’utilisation civile des drones se développe à pas de géants. A tel point qu’il devient difficile d’énumérer les usages qui peuvent en être fait : livraison, loisir, journalisme… Tout y passe ! Nous sommes ici loin de l’aéromodélisme cher à nos parents.
Conscient de leur développement rapide, le Parlement européen a adopté, le 15 septembre dernier, en prélude à l’adoption prochaine d’une réglementation, un rapport de la commission des Transports relatif à l’utilisation de ces "véhicules aériens sans pilote" sur l’espace européen. Ce rapport poursuit deux objectifs : encadrer le développement de l’industrie du drone civil et harmoniser les règles de l’UE relatives aux drones.
Pour atteindre ces objectifs, l’Union européenne est consciente qu’elle devra concilier sécurité et souplesse, c’est-à-dire contrôler mais aussi laisser les acteurs concernés expérimenter et innover. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle, dans le détail, ce rapport différencie usage commercial et récréatif des drones, tout en essayant de garantir la protection de la vie privée des personnes survolées. On remarquera à cet égard que ces règles rapportées s’inspirent de la réglementation française, l’une des plus élaborées en la matière.
Une réglementation française très encadrée
A l’heure de l’élaboration d’un cadre légal européen pour les drones, une brève comparaison des législations française (la plus encadrée) et anglaise (la plus libérale), permettra de se faire une idée sur la nécessité de simplifier et d’harmoniser les règles en la matière.
En France, le réglementation des drones civils est issue de la combinaison de deux arrêtés du 11 avril 2012 (arrêtés du 11 avril 2012 : JORF n°0109, 10 mai 2012, p.8643 et 8655) qui réglementent les drones selon leurs caractéristiques et les soumet pour principe aux règles de l’air (sur ce point, un accès libre à l’espace aérien est prévu en dessous de 150 mètres, sauf exceptions).
Sur les règles applicables aux machines, la réglementation française fait une classification en catégories d’aéromodèles selon deux critères : le poids (inférieur ou supérieur à 25 kilos) et selon qu’ils sont ou non pourvus d’un appareil de prise de vue. Le poids de référence choisi étant particulièrement significatif (la plupart des drones de loisir en vente libre n’avoisinent pas ce poids), le critère de différenciation des drones est très certainement celui de l’équipement ou non d’un appareil de prise de vue.
En effet, dans le cas d’un appareil de moins de 25 kilos dépourvu d’appareil de prise de vue, l’utilisateur est dispensé de documents de navigabilité et donc d’autorisations de vol. Toutefois, dès lors qu’il est équipé d’un tel appareil, en raison de l’impératif de protection de la vie privée, des règles spécifiques s’appliquent : obligation de vol à vue à moins de 100 mètres de distance et de 150 mètres d’altitude, interdiction de voler à 30 mètres d’une personne etc.
Une nécessaire harmonisation
De l’autre côté de la Manche, la réglementation des drones répond à la même démarche de classification que la réglementation française. Les drones y sont régis par les règles qu’édicte la Civil Aviation Authority (« CAA »), qui classifie les drones en trois catégories de poids : (i) moins de 20 kg, (ii) 20 à 150 kg et (iii) plus de 150 kg. Pour la catégorie des drones de moins de 20 kg, aucune autorisation n’est requise. Si le drone pèse 20 kg ou plus, un permis délivré par la CAA est exigé.
Concernant la possibilité de filmer ou de photographier avec son drone, comme pour la règlementation française, certaines règles supplémentaires doivent être observées : Pour le décollage et l’atterrissage, le drone doit être tenu à une distance de 30 mètres de toute personne physique ; En vol, le drone doit être tenu à une distance de 50 mètres de toute personne, véhicule ou structure hors du contrôle du pilote et celui-ci ne peut voler à une distance de moins de 150 mètres d’une zone de forte.
Que comprendre de cette comparaison des réglementations ? Les législateurs doivent faire face à un double impératif : vu d’en haut, protéger le ciel et vu d’en bas, protéger les libertés publiques et surtout, la vie privée des personnes survolées. La multiplication des rapports et des communications de différentes agences et autorités sur la question montre, que la réglementation des drones est une problématique majeure à laquelle on doit rapidement trouver une solution. Le constat est clair : la technicité des règles actuelles, nuit à leur efficacité. L’harmonisation et la simplification des règles s’avère donc être une nécessité.
Ozan Akyurek est spécialisé en contentieux commercial-droit des affaires au sein du cabinet d'avocats Jones Day.
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