Design to Cost and Value : compétitivité et valeur, le modèle gagnant pour affronter les nouveaux défis

Le choc est violent. La crise sanitaire frappe sur toute la planète, secoue les modèles économiques et fragilise les acteurs entreprises. Pour affronter cette bourrasque et faire face à de nouveaux défis, elles doivent tout à la fois parer à l’urgence, devenir toujours plus compétitives et innover. Un changement de paradigme qui implique résilience et invention de nouveaux modèles de production. Au centre de cette équation, le Design to Cost and Value devient vital.

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Design to Cost and Value : compétitivité et valeur, le modèle gagnant pour affronter les nouveaux défis

Au cœur de la transformation du business model des entreprises, le Design to Cost and Value est de plus en plus adopté, notamment dans le secteur industriel. Concevoir des produits à coûts objectifs pour rester compétitif apparaît aujourd’hui incontournable dans un environnement mondialisé où la concurrence est toujours plus agressive. Mais à l’heure où les entreprises doivent tout à la fois, rationaliser les coûts, innover, accélérer les cycles de production, faire face à de nouvelles contraintes (environnement, sécurité, énergie, normes réglementaires), le Design to Cost and Value s’impose comme un enjeu vital. Il s’agit de conjuguer deux concepts en apparence antinomiques, optimiser les coûts et créer de la valeur client.

Actionner tous les leviers

Le Design to Cost and Value incite les entreprises à voir plus loin, à se fixer des objectifs ambitieux, à mobiliser toutes les ressources en interne, à faire tomber des barrières, à définir un projet partagé par les partenaires et fournisseurs. Tous les leviers peuvent alors être actionnés sur l’ensemble de la chaîne de valeur afin de concevoir des produits innovants améliorant les services et l’expérience utilisateurs.

Les résultats sont souvent spectaculaires : réduction radicale des coûts directs, simplification des process, conquête de nouveaux marchés.

« L’approche Design to Cost classique est remise en question par les managers qui s’orientent vers la « servicisation » de l’offre, constate Natacha Tréhan, spécialisée en Management des Achats et gestion des relations clients fournisseurs à Grenoble IAE. Elles ne vendront plus seulement un produit mais une performance d’usage. Schneider Electric, par exemple, ne proposera plus des équipements à des industriels mais des solutions d’optimisation énergétique basées sur un contrat de performance. De même, Abott Roche Diagnostic ne vend pas des équipements aux laboratoires, mais facture un coût pour chaque type d’analyse médicale (hématologie, immunologie…). »

et services associés

Ce modèle se développe et va s’accélérer. Il offre au fournisseur des marges importantes sur le service personnalisé et des revenus récurrents. Et il permet au client, lors de périodes d’endettement, de transformer l’investissement en charges d’exploitation. D’autre part, le big data et l’Internet des objets favorisent la personnalisation de l’offre client et la création de valeur sur de très nombreux services associés.

« Dans un modèle classique, le fournisseur cherche à vendre plus d’équipements et de consommables. Augmenter la durée des machines n’est pas sa priorité. Le client, lui, souhaite restreindre les consommables et limiter le remplacement des machines. Leurs intérêts sont antagonistes, explique Natacha Tréhan. Dans la logique de la servicisation, le partage des données et la co-construction de l’offre favorisent la convergence des intérêts. Quand le modèle est abouti, la valeur coproduite est partagée sur les bases d’un système incitatif. Une partie de la rémunération du fournisseur peut, par exemple, être basée sur les économies obtenues par le client, notamment sur la maintenance, le remplacement de l’appareil ou la consommation énergétique. Elle peut aussi être indexée à la hausse du chiffre d’affaires du client, induite par une utilisation plus fonctionnelle du matériel. »

Créer de la valeur pour produire français

Le Design to Cost and Value peut s’adapter à tous types de structures, d’organisations, d’entreprises de toutes tailles. Spécialisée dans l’injection plastique pour l’automobile, la domotique, la cosmétique et d’autres secteurs industriels, la PME MIHB innove en permanence, en développant notamment des nouveaux matériaux composites sans carbone. L’entreprise familiale, implantée dans l’Ain, qui emploie 175 personnes, a fait le choix de produire 100 % français. « Dès 2005, on nous incitait à délocaliser, indique Frédéric Julien, qui dirige l’entreprise à la suite de ses parents. Pour continuer à faire du Made in France, il a fallu trouver des solutions en optimisant les coûts et en apportant de la valeur au client. Nous avons mis en place des process avec nos fournisseurs pour la réalisation d’ensembles complets, ce qui évite aux clients d’acheter des pièces à différents acteurs de la filière. Tout le monde est gagnant, on augmente l’efficacité en proposant une solution technico-économique. C’est valorisant et ça nous fait progresser. Rester sur l’ancien modèle basé uniquement sur le coût, ne permet pas de préparer l’avenir, dans un contexte de sous-enchère permanent. Nous investissons sur les produits à forte valeur ajoutée et les savoir-faire humains en favorisant la collaboration et les partenariats en amont et en aval, fournisseurs et clients. »

Une entreprise résiliente, qui a perdu 65 % de chiffre d’affaires depuis le début de la crise mais qui connaît une activité soutenue et prévoit moins 15 % fin 2020, grâce notamment aux mesures d’accompagnement de l’État. « Nous devons devenir plus agiles et plus frugaux, faire mieux avec moins », assure avec optimisme, Frédéric Julien.

Sauver les meubles ou voir plus loin ?

Pas si simple, pourtant, de regarder plus loin dans un contexte aussi perturbé. Pour beaucoup de chefs d’entreprises, la lisibilité est au niveau zéro pour les semaines ou mois qui viennent, le nez reste dans le guidon pour gérer l’urgence. « Lors du premier confinement, les dirigeants qui ont pu poursuivre l’activité, ont pris des mesures pour s’adapter, en s’appuyant sur l’accompagnement financier de l’État. Mais, depuis le second confinement, beaucoup sont dans le sauve-qui-peut, la préoccupation première est de maintenir l’entreprise en vie », observe Denys Guilard, analyste du réseau Cosma Experts, qui conseille PME et ETI des secteurs de la métallurgie, l’aéronautique ou les biens de consommation. D’autant que certains grands donneurs d’ordre ont opportunément tendance à réduire fortement les contrats des sous-traitants.

« Difficile dans ces conditions de penser compétitivité, valeur, et d’imaginer de nouveaux process. Dans les secteurs à l’arrêt ou en forte diminution, la résilience c’est d’abord trouver les moyens de continuer l’activité, en sauvegardant l’emploi. Dans une telle situation, produire à moindre coût, reste le premier objectif. »

Dans certains secteurs cependant, la crise et ses conséquences ouvrent de nouvelles perspectives, à l’exemple d’une entreprise qui fournit de l’énergie à des industriels. « Cette société a pu accélérer son programme de production d’hydrogène en optimisant les aides de l’État dans le cadre d’une politique globale vers le Zéro carbone. C’était le bon moment. Cette société a su augmenter sa compétitivité en créant de la valeur, une démarche réactive et agile. »

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