Des Sea Bubble sur la Seine ? C'est le rêve d'Alain Thébault
Elle ressemble à une bulle montée sur patins et offre quatre places. La Sea Bubble, c’est le dernier projet du navigateur Alain Thébault, le père de l’Hydroptère. Ce drôle de bateau électrique pourrait bientôt transporter des passagers sur la Seine, la Tamise ou le lac Léman.
C’est le nouveau défi d’Alain Thébault, l’homme qui a fait le premier "voler" un bateau capable d’affronter la haute mer. Sa "Sea Bubble" est aussi un bateau qui se lève sur des patins, mais elle s’apparente beaucoup plus à un taxi qu'à une Formule 1. "Ce sont mes filles qui ont provoqué le déclic, raconte Alain Thébault. Elles m’ont dit un jour : 'C’est très bien d’avoir battu le record de vitesse à la voile, mais que pourrais-tu faire pour être utile à la planète'."
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Frappé par le nombre d’embouteillages dans les rues longeant un fleuve ou un lac, comme à Paris ou à Genève, il imagine un système de transport associant souplesse, silence et confort. Il prend son cahier et commence à faire des croquis.
Depuis longtemps convaincu que l’avenir appartient aux bateaux volants, Alain Thébault imagine tout de suite un bateau monté sur des foils (patins) offrant quatre places et capable de sortir de l’eau à faible vitesse. Fort de son expérience, forgée aussi bien sur ses réussites que sur ses échecs, il insiste sur l’importance de commencer par des schémas crayonnés. "J’ai commencé à concevoir seul la Sea Bubble. Il faut d’abord s’appuyer sur du bon sens, je fonctionne comme un paysan de la high-tech. Ce n’est qu’ensuite que je fais appel à des ingénieurs qui vont utiliser leurs ordinateurs".
Les six "papés" toujours fidèles
Suite à sa brouille avec son ancien sponsor Suisse, Alain Thébault a vu un certain nombre des ingénieurs ayant travaillé sur l’Hydroptère poursuivre sur le projet désormais concurrent Hydroptere.ch. Mais il a gardé ses fidèles "papés", un groupe de six ingénieurs de haut vol, retraités passionnés, et il travaille avec le champion de planche à voile suédois Anders Bringdal.
Le prototype du Sea Bubble, il le fabrique lui-même. "Je veux garder mes secrets", argumente-t-il. Il est difficile de lui arracher quelques détails. Il a réalisé une forme dans un bloc de mousse qui sert de moule pour fabriquer la coque en fibre composite en lin, en collaborant avec Kaïros, l’entreprise du coureur au large Roland Jourdain. Mais l’élément le plus important, ce sont les foils et leur forme adaptée pour supporter la Sea Bubble dès la vitesse de 5 nœuds (9,3 kilomètres à l’heure).
Naviguer sur des foils présente plusieurs avantages : en réduisant fortement la traînée, la "Bulle" ne crée pas de vagues susceptibles d’abîmer les berges, offre un grand confort aux passagers avec ses mouvements plus doux et a besoin de 30 à 40 % d’énergie en moins à vitesse égale. Ce qui la rend tout à fait apte à une motorisation électrique. Cette partie ne pose pas de difficulté particulière, pas plus que le choix des batteries. Et, pour Alain Thébault, "ce choix d’un moteur électrique permettra aux Sea Bubble d’aller sur des zones protégées, comme à Port Cros dans le Var ou Scandela en Corse".
Une future version entièrement autonome
Pour réaliser son projet, Alain Thébault a créé à la fin du mois de décembre 2015 une start-up, Sea Bubble. Henri Seydoux, le PDG de Parrot, est entré de manière symbolique au capital, une manière d’apporter son soutien. Deux prototypes à l’échelle un huitième vont être fabriqués, avant un troisième à l’échelle 1, qui devrait naviguer à la fin du printemps sur la Seine.
Anne Hidalgo, maire de Paris, a écrit à Alain Thébault à ce propos : "Je souhaiterais, si possible, que Paris soit la première capitale à tester les deux premiers prototypes de vos bulles volantes électriques sur la Seine, dès le printemps. Vous pouvez compter sur mon soutien."
Une vidéo de deux Sea Bubble se croisant au pied de la Tour serait effectivement du plus bel effet. Londres aurait déjà manifesté son intérêt, tout comme Hong Kong. Et si la vitesse sur la Seine est limitée à 18 kilomètres à l’heure (9,6 nœuds) et même 12 kilomètres (6,5 nœuds) à l’heure à moins de vingt mètres des berges, ce n’est pas le cas sur la Tamise à Londres ou en zone côtière maritime à San Francisco ou Hong Kong.
L’enthousiasme et l’optimisme n’ont pas quitté Alain Thébault. Dès 2017, il se voit vendre au moins 500 Sea Bubble dans le monde. Dans un premier temps, les "Bulles" fonctionneront à la manière des véhicules de transport avec chauffeur (VTC), avec des prix équivalents. Mais l’objectif est de les rendre totalement automatiques et autonomes.
L’intérêt d’Henri Seydoux n’est probablement pas étranger à ce futur développement. Parrot maîtrise un système de pilotage automatique de drone, la présentation de son Disco au salon CES de Las Vegas au début de mois de janvier l’a prouvé. Mais impossible d’en savoir plus. Alain Thébault reste muet sur le sujet, tout en semblant sûr de son fait du point de vue technique. Les autorisations administratives seront certainement le volet le plus complexe du projet.
Patrice Desmedt
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