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Des outils numériques pour éviter les foyers de Covid-19 dans les casernes de pompiers
Pour éviter que le coronavirus ne se propage dans les casernes, quatre services départementaux suivent l'état de santé de leurs agents, par le biais de l'appli E-Sdis santé. Le dispositif concerne près de 12 000 personnes : sapeurs-pompiers, personnels administratifs et techniques…
Chaque matin, le même rituel : les sapeurs-pompiers reçoivent un questionnaire de santé par email. En moins de deux minutes, ils indiquent d'éventuels symptômes liés au Covid-19, tels que fièvre, toux, perte du goût ou de l'odorat… Dans la demi-heure qui suit, un médecin ou un infirmier du service départemental d'incendie et de secours (Sdis) appelle ceux qui présentent des signes de la maladie, en tenant compte de leurs facteurs de risque (antécédents médicaux, âge, environnement familial, etc. ) renseignés au préalable. Depuis le printemps, ce sont près de 12 000 sapeurs-pompiers et personnels administratifs et techniques de Sdis qui bénéficient de ce dispositif dans quatre départements : l'Allier, la Seine-et-Marne, les Yvelines et la Corse-du-Sud.
Un suivi massif
Baptisée «Covid-Help» par la société Anamnèse, start-up du domaine médical, et renommée «E-Sdis santé» pour les sapeurs-pompiers, cette application « qui ne se télécharge pas », comme la définit Jérôme Bourreau, cofondateur d'Anamnèse, est entrée en service le 24 mars au Sdis de l'Allier, avec qui la start-up l'a développée. «L'objectif est d'identifier les sapeurs-pompiers malades dès les premiers symptômes pour éviter la contagion dans les centres de secours en les isolant et les prendre en charge au mieux», explique Julien Fischer, porteur du projet au Sdis de l'Allier et membre d'Atraksis, association de sapeurs-pompiers engagée sur les nouvelles technologies. En quelques clics, l'outil offre un suivi massif de l'état de santé des personnels, avec une réactivité quotidienne.
Fortement impacté par l'épidémie de Covid-19, avec trois clusters dans des centres de secours, cinq sapeurs-pompiers en réanimation et le décès d'un infirmier de sapeur-pompier volontaire, le Sdis des Yvelines n'a pas hésité à rejoindre la démarche. «Nous avons ainsi pu détecter une soixantaine de cas, passés à travers les radars, mis en quatorzaine», témoigne Sébastien Avenel, référent du dispositif au Sdis des Yvelines.
Pour le management, cette photo graphie de l'état de santé des effectifs, en temps réel, permet d'adapter la ressource des centres de secours touchés par le coronavirus, immédiatement après le remplissage du questionnaire, et ainsi d'assurer la continuité du service. «La cellule d'appui créée par le Sdis pour faire face à l'épidémie intègre E-Sdis santé», illustre Christian Potevin, au groupement «opérations» du Sdis des Yvelines. Quant aux services de santé des Sdis, ils gagnent en fluidité.
Adhésion des troupes
«Dans la plupart des départements adhérents, le suivi des malades se faisait auparavant par le biais d'un tableur Excel !» souligne Thibaut Reffay, du Sdis de Seine-et-Marne. Une méthode chronophage pour des équipes médicales qui, au cœur de la crise, avaient plusieurs dizaines de malades à gérer chaque jour. «Ce système réalise un premier tri, sur une base médicale, ce qui permet de cibler nos appels », témoigne Jean-Antoine Rosati, médecin-chef du Sdis de l'Allier, dont le service de santé a contribué à l'élaboration de l'outil.
Fonctionnant sur la base du volontariat, le dispositif nécessite de susciter l'adhésion des troupes. «Dans l'Allier, 85 % des effectifs se sont prêtés à l'exercice», se félicite Julien Fischer. Le pourcentage peut néanmoins varier d'un centre de secours à l'autre. «Pour les Yvelines, il oscille entre 7 % et 90 %, selon que le commandement a présenté la démarche et ses enjeux, ou pas", détaille Sébastien Avenel. Certains se montrent réticents à fournir leurs données médicales, craignant qu'elles nuisent à l'évolution de leur carrière. «Seuls les médecins y ont accès, rassure Jérôme Bourreau. A ce titre, l'application résout le paradoxe de structures tenues de veiller à la santé des personnels, sans être autorisées, comme certaines l'ont tenté, à prendre la température à l'entrée des locaux chaque matin.»
Usages post-coronavirus
Logiquement, le reflux épidémique a conduit à un relâchement du nombre de répondants. «Au moment où nous avons rejoint le dispositif, à la mi-avril, le plus dur de la crise était passé», avance Eric Bernes-Luciani, médecin-chef au Sdis de Corse-du-Sud, pour expliquer que seulement une centaine d'agents se soient inscrits, dans l'un des territoires pourtant le plus touché par le coronavirus.
Alors que l'incertitude demeure quant à l'évolution de l'épidémie, E-Sdis santé permet de surveiller une éventuelle reprise. Mais ses utilisateurs voient plus loin. Ils réfléchissent déjà, avec Anamnèse et l'association Atraksis, à de nouveaux usages, post - Covid-19. L'appli pourrait, par exemple, servir à suivre l'état de santé des sapeurs-pompiers après des événements, comme les incendies de Lubrizol ou de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Elle pourrait aussi permettre la création d'un carnet numérique «incendie», pour surveiller l'exposition aux fumées des agents, un sujet sensible. Une veille sur les risques psychosociaux est par ailleurs envisagée ou encore l'éducation à la prévention.
4 000 €
C'est le coût de l'installation du logiciel E-Sdis santé pour un effectif de 3 000 personnes, auquel il faut ajouter environ 5 euros par agent par an.
Les Sdis qui ont développé l'outil à titre expérimental avec la société Anamnèse en ont bénéficié gracieusement.
«J'ai vu se dessiner la courbe de l'épidémie en temps réel»
Jean-Antoine Rosati, médecin-chef du Sdis de l’Allier
« L'outil E-Sdis santé nous a été présenté début mars pour identifier les cas de Covid-19 parmi nos agents. Sur 1 700 sapeurs-pompiers volontaires, 214 sapeurs-pompiers professionnels et 62 personnels administratifs et techniques, 85 % de l'effectif s'y sont inscrits. En fonction de leurs réponses au questionnaire envoyé quotidiennement par l'appli, ils étaient classés en trois couleurs : vert, pour aucun symptôme ; orange, pour quelques symptômes, comme de la toux ou le nez qui coule ; rouge, pour de nombreux symptômes significatifs, comme la perte de goût et de l'odorat. Nous avions en permanence trois médecins de garde, chargés de contacter par téléphone ou par visioconférence les personnes classées “rouge“ : ils suivaient leur état de santé, leur prescrivaient une mise en “quatorzaine“… Trois infirmiers de garde se chargeaient quant à eux de contacter les personnes classées “orange“. Les autres restaient en auto-suivi.
Au cœur de l'épidémie, nous avions quinze à vingt personnes en rouge chaque jour et une trentaine en orange ! J'ai vu se dessiner la courbe du Covid-19, avec son pic et son reflux, en temps réel, parmi nos personnels. La réactivité de l'outil et sa facilité d'usage sont de vrais atouts. Ce dispositif nous permet d'appeler uniquement les personnes symptomatiques, ou en contact avec des personnes symptomatiques. Moi qui travaille par ailleurs dans un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, j'aurai aimé bénéficier du même dispositif… »
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