Des entreprises technologiques menacent de quitter la Biélorussie
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\ 16h10
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MOSCOU/MINSK (Reuters) - Des entreprises technologiques menacent de quitter la Biélorussie après la réélection contestée du président Alexandre Loukachenko, se disant notamment choquées par la répression menée par le régime et les coupures d'internet.
Les histoires de détenus torturés et les images d'agents en civil s'en prenant aux manifestants dans la rue ont ébranlé nos employés à Minsk, explique Mikita Mikado, le directeur général de PandaDoc, un éditeur américain de logiciel.
"Tout le monde dans la communauté informatique, tous les Biélorusses à l'intérieur et à l'extérieur du pays ont été choqués. Ils ont été choqués par la manière flagrante dont les élections ont été truquées et par l'ampleur de la violence qui s'en est suivie", a-t-il dit.
Selon une enquête interne, 83% des salariés de PandaDoc souhaitent quitter la Biélorussie. "Si ce gouvernement se maintient, PandaDoc quittera la Biélorussie", a prévenu Mikita Mikado.
Au moins trois manifestants ont été tués et des milliers d'autres, dont des salariés de PandaDoc, ont été arrêtés.
Le gouvernement d'Alexandre Loukachenko, qui dément toute fraude et actes de torture, n'a fait aucun commentaire sur des menaces des entreprises informatiques de quitter le pays.
COUPURE INTERNET
Les salariés des entreprises technologiques ont rejoint les enseignants dans les manifestations de grande ampleur qui secouent la Biélorussie depuis le 9 août, date de la réélection d'Alexandre Loukachenko, qui dirige le pays d'une main de fer depuis 26 ans.
EPAM Systems, basé aux Etats-Unis et fondé par deux Biélorusses en 1993, a lancé un programme de reconversion permettant aux salariés abusivement licenciés pour avoir soutenu l'opposition de débuter une carrière dans l'informatique.
Arkady Dobkin, l'un des co-fondateurs d'EPAM, figure parmi les signataires d'une lettre ouverte appelant à la libération des prisonniers et à de nouvelles élections.
"Les start-up ne sont pas nées dans une atmosphère de peur et de violence", indique la lettre, mettant en garde contre un départ massif de spécialistes à l'étranger.
Djamel Agaoua, le directeur général de Viber, filiale de Rakuten, a déclaré à Forbes.ru que le groupe pourrait suspendre ses investissements dans le pays, deux salariés de la messagerie ayant été placés en détention, dont un qui est désormais hospitalisé.
Alors que les manifestations s'intensifient, la Biélorussie a enregistré des coupures d'internet pendant plusieurs jours, ce qui a perturbé le flux de messages, d'informations et de vidéos partagés sur les réseaux sociaux par les manifestants.
Le gouvernement a imputé ces coupures à des interférences extérieures.
"La brutalité policière n'a pas été l'événement le plus surprenant en Biélorussie, mais le fait qu'internet même ait été entièrement coupé", a souligné Michael Rumiantsau, un Biélorusse co-fondateur de l'éditeur de logiciels FriendlyData désormais cédé à ServiceNow.
Le parc informatique de Minsk représentait en 2019 6,1% du produit intérieur brut du pays.
"La technologie biélorusse va souffrir parce que les talents vont chercher les moyens de s'échapper du pays", prédit Mikita Mikado.
(Avec Matthias Williams; version française Claude Chendjou, édité par Jean-Michel Bélot)