Demain, une industrie réenchantée par un dialogue avec la nature
La fondation EDF expose une trentaine d’oeuvres qui imaginent comment demain la nature, la science et le design pourraient travailler main dans la main. De films en installations, de photographies en prototypes, l’ensemble met en avant un futur mutant et désirable, où l’hybridation du vivant donnerait naissance à des formes nouvelles terriblement séduisantes.
En plein cœur du Paris chic, dans la piétonne rue Récamier, se trouve l’atelier des visionnaires du futur. A peine poussée la porte métallique, vous vous retrouverez dans une sorte d’étrange forêt suspendue, composée de squelettes en acier, de récipients en verre et de plumes, s’animant en fonction des mouvements des visiteurs. Vous êtes à l’exposition "En vie aux frontières du design" et vous découvrez l’installation de Philip Beesley : "Radiant Soil", dont le projet est d’imiter un métabolisme en vie. Car c’est le point commun de tous les œuvres de jeunes artistes et designers exposées dans cet espace que d’imaginer de nouveaux liens entre la nature, en unissant les avancées dans la connaissance du vivant, le souci du développement durable et la recherche du Beau.
Un drone méduse pour l’irrigation
Sur trois étages, sont donc présentés 34 projets répartis en cinq familles selon le rapport que le créateur entretient avec la nature. Vous naviguerez donc entre les plagiaires (pour lesquels "la nature est un modèle"), les nouveaux artisans (pour lesquels elle est "un collègue de travail "), les bio-hackers (qui "la reprogramment") les nouveaux alchimistes (qui "l’hybrident") ou les agents provocateurs (qui "l’imaginent"). Au-delà de cette présentation thématisée, chacun peut circuler et s’amuser à trouver d’autres liens entre les œuvres exposées, qui ressortissent de toutes les catégories (installations, films, photographies, sculptures ou objets) mêlant prototypes qui ne verront peut-être jamais le jour, nature fantasmée et réalisations existantes, comme par exemple le "récipient #1" de Tomas Libtertiny, un vase réalisée grâce au travail de 60 000 abeilles durant deux mois, exposé au rez-de-chaussée. A l’étage supérieur, on peut admirer Robot Jellyfish drone (un drone méduse) imaginé par Vincent Fournier, pour apporter automatiquement de l’eau des rivières aux terres cultivées durant les périodes de sécheresse.
Des tentatives d’hybridation du vivant sont aussi proposées, comme les très étranges et passionnantes photographies du décidemment inspiré Vincent Fournier qui réussit à photographier des animaux hybrides du futur, un lapin, un lézard ou un scarabée, à la fois familiers et étranges. Autre inspiration : des plantes mutantes, produisant des tissus. Carole Collet imagine un "Strawberry noir", un hybride magnifique de fraisier produisant des fraises noirs et de la dentelle. Deux étages plus bas, la même propose une vidéo qui présente ce même travail. A noter que les autres vidéos présentées dans cet espace (toutes disponibles en ligne) sont toutes d’une étrange poésie.
Réduire l’humanité pour préserver l’environnement ?
Entre le niveau -1 et le premier étage, le visiteur pourra admirer des paillasses devenues des installations d’art contemporain. Au niveau -1, on trouvera des projets de laboratoires du futur, à partir du travail de designers actuels. L’un d’entre eux imagine des matériaux haute performance grâce à la biosynthèse, quand une autre travaille sur le lien entre architecture et science et expose 24 exemples d’impressions 3D de "briques" inspirées du réseau cellulaire pour les constructions de demain.
Sous la même forme, Arne Hendriks présente "The incredible shrinking humans project", soit le bureau laboratoire d’un savant du futur, dont le projet serait de réduire l’humanité pour que l’espèce humaine ne dépasse pas la taille de 50 centimètres. Partant du constat qu’une augmentation de 10 % de la taille se traduit par une hausse de 33 % du poids, augmentant le besoin de ressources naturelles (un site est consacré au projet). Drôle d’atelier d’un professeur Folamour, non dénué d’humour comme en témoigne le photo-montage d’un cow boy promenant à l’aide d’un lasso un coq, de la même taille que lui.
Nul doute qu’un esprit scientifique aura un parcours et un regard différent sur les œuvres exposées que son homologue littéraire. Le premier réfléchira à la faisabilité des œuvres proposés, comme ces perles produites artificiellement par Emile de Visscher durant la durée de l’exposition, ou cette chaussure du futur en protocellules présentée par Sam J. Bond. Le second se laissera davantage bercé par l’étrange mystère des paillasses et des tubes à essais, qui lui évoqueront la définition du surréalisme d’André Breton comme "la rencontre fortuite sur une table à dissection d’un parapluie et d’une machine à coudre".
Le plus grand mérite de cette exposition est de donner à notre futur technologique l’allure d’un rêve, quand trop souvent, il est décrit comme un cauchemar fatal.
Foncez y. En plus c’est gratuit !
Christophe Bys
Aux frontières du design, Espace fondation EDF.
Du 26 avril au 1er septembre, 6 rue récamier Paris 75007
Demain, une industrie réenchantée par un dialogue avec la nature
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