"Dans le soutien à l’export, tout le monde fait tout, partout et nulle part", selon Nicole Bricq

La ministre du commerce extérieur Nicole Bricq détaille pour L’Usine Nouvelle son projet de réforme du dispositif de soutien à l’export. Une mission a été lancée début octobre pour évaluer un rapprochement entre les agences Ubifrance et AFII.

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L’Usine Nouvelle - Une mission de préfiguration vient d’être lancée pour étudier le rapprochement entre Ubifrance, qui s’occupe du soutien aux PME exportatrices, et l’Agence française pour les investissements internationaux (AFII). Quel est son intérêt ?

Nicole Bricq - Tous les grands pays exportateurs n’ont qu’une seule agence qui s’occupe à la fois de l’accompagnement des entreprises à l’export et de l’attractivité du territoire. C’est le cas de la Suède, de l’Allemagne, de la Grande-Bretagne... Le commerce mondial a changé du tout au tout. Il faut être mobile, réactif. Nous sommes dans des flux croisés d’investissements car les chaînes de production sont imbriquées à l’échelle du monde. Le deuxième constat est plus opérationnel : l’AFII compte 90 salariés dans 23 pays. Ubifrance dispose de dix fois plus de collaborateurs dans 70 pays. Compte tenu de l’enjeu, qui est de garder notre place de première destination en Europe pour l’implantation de centres de production, le réseau de l’AFII n’est plus suffisant.

Comment cela se passera-t-il ?

Ubifrance et l’AFII n’ont pas les mêmes missions, mais ils font appel aux mêmes compétences. Dans les deux cas leur objectif est de promouvoir la France. La mission de préfiguration fera des propositions d’organisation et le Premier ministre tranchera. Cela se fera par étapes. Encore une fois, mon objectif n’est pas de me lancer dans un meccano mais de faire en sorte de fédérer les énergies autour d’un projet commun : faire gagner la France et les entreprises françaises. Notre dispositif est parfois trop administratif. La grande force des anglo-saxons est de faire circuler l’information très vite. Et puis, dans un contexte budgétaire contraint, la mutualisation doit aussi nous permettre de faire des économies à la longue, en réduisant les immobilisations dans les locaux par exemple.

Est-ce que les chambres de commerce à l’étranger pourraient être aussi intégrées à cet ensemble ?

Nous avons commencé à rapprocher Ubifrance et "CCI international" qui regroupe les équipes internationales des CCI. Ils sont complémentaires. Les CCI ont la capacité de détecter les entreprises qui sont prêtes à aller à l’international. Le portail internet commun, qui sera mis en place d’ici la fin de l’année, devrait les aider à travailler ensemble. S’ils veulent aller plus loin, ils le feront mais je ne suis pas là pour bousculer les gens. Je suis là pour les fédérer, qu’ils aient des projets communs. Il faut aussi fédérer le secteur agroalimentaire. Nous perdons du terrain alors que c’était une de nos places fortes. Avec Stéphane Le Foll et Guillaume Garot [ndlr : ministre délégué à l’Agroalimentaire], nous avons demandé à Sopexa [ndlr : organisme de promotion de l’agroalimentaire] et Ubifrance de nous faire des propositions concrètes de rapprochement. Nous leur avions demandé l’an dernier de faire au moins des stands communs à l’étranger. Mais au bout d’un an, les bonnes pratiques, les codes de bonne conduite n’ont pas marché…Il faut donc aller plus loin.

Vous ne croyez pas aux équipes de France ?

Jusqu’à présent, tout s’est fait par le haut. On signe une charte avec différents acteurs sur laquelle on communique et puis… plus rien. Résultat : lorsque je suis arrivée au gouvernement, il y avait 75 milliards d’euros de déficit commercial. Bien sûr, il y a des causes structurelles qui tiennent à la baisse de notre compétitivité. Mais la manière d’être organisé pour soutenir l’exportation des entreprises compte aussi. Tout le monde fait tout, partout et nulle part. On peut peut-être s’interroger, surtout lorsqu’on se compare à des pays comme l’Italie. A l’arrivée, sept entreprises sur dix abandonnent l’exportation au bout de trois ans.

La diplomatie économique de Laurent Fabius ne vous complique-t-elle pas la tâche ?

Je trouve très bien qu’il mobilise ses ambassadeurs. Pour ma part, je m’occupe de ce qui fait 90 % du commerce extérieur. Bien évidemment, je rencontre les grands groupes lorsque je me déplace. Mais j’emmène avec moi les PME, qui ont moins de visibilité. En les accompagnant, nous leur faisons gagner un temps fou. Je fais une diplomatie économique de terrain.

Le déficit commercial devrait être en recul cette année, selon les Douanes. Quel est votre objectif pour 2013?

S’il y a une petite reprise en Europe, cela sera favorable à notre commerce extérieur. A priori nous devrions être en dessous des 60 milliards de déficit. Mais nous devons mettre les bouchées doubles. En début d’année, je suis beaucoup allée en Asie. Je me suis donnée deux priorités désormais : l’Europe et l’Afrique, où la croissance est forte et des classes moyennes émergent. Je me rendrai en Ethiopie, au Ghana et en Côte d’Ivoire d’ici la fin de l’année.

Propos recueillis par Solène Davesne et Pascal Gateaud

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