Contrats sur les primes sur l’aluminium: le LME a un temps de retard
Les nouveaux contrats à terme sur les primes de l’aluminium, dont le London Metal Exchange a annoncé le lancement au 4e trimestre 2015, vont arriver trop tard, tant pour les producteurs que pour les acheteurs.
Initialement annoncé par le LME pour le 26 octobre, le lancement de ces contrats de hedging sur les "primes lingot" de l'aluminium a été retardé au 23 novembre pour coïncider avec la mise à jour de la plateforme LMEmercury, afin de réduire la période de test pour les utilisateurs. Ce lancement sera couplé avec celui des nouveaux contrats à terme sur les ferrailles et barres acier.
Un outil de couverture qui arrive après la crise
Les nouveaux contrats créés par la bourse londonienne des métaux sont un outil de couverture sur le risque de variation des primes sur l’aluminium, dite "primes lingot". Ces dernières sont la composante du prix total de la tonne physique correspondant à l’origine aux frais de transport et d’assurance du métal. Elles reflètent aujourd’hui, outre ces frais, sa disponibilité : plus les stocks tardent à sortir des entrepôts, plus elles montent pour une livraison immédiate. Or les files d’attentes se sont allongées dernièrement, notamment à Detroit (Etats-Unis) et à Vlissingen (Pays-Bas). La prime lingot a représenté, fin 2014, jusqu’à 20% du prix de l’aluminium au LME, ce qui avait provoqué l’inquiétude des utilisateurs du métal léger et des modifications de la composition du prix des produits élaborés à base d’aluminium, comme le fil machine.
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Producteurs et acheteurs du même avis
"Nous défendions l’idée de ce contrat en septembre 2013, lorsque les primes étaient en hausse. Il aurait alors pu protéger les consommateurs, a déclaré à Reuters le directeur des ventes et du marketing de Rusal Steve Hodgson. Il n’a pas non plus été lancé lorsqu’elles ont commencé à baisser, ce qui aurait protégé les producteurs. Le LME a raté le train." Il faut rappeler que ces déclarations interviennent après que Rusal a poursuivi le LME, qui comptait réformer le stockage (pour l’accélérer) dans les entrepôts qu’il contrôle, forçant ainsi les primes à baisser brutalement. Une baisse qui, sans compensation sur le prix de base de l’aluminium, aurait mis les producteurs comme Rusal en difficulté.
Même analyse du côté des acheteurs, même si les motivations sont presque opposées : "le plan A était de réduire l’attente à la sortie [des entrepôts du LME], et cela a fonctionné. Nous n’avons donc pas besoin du plan B, les contrats sur les primes", confirme un trader en matières expérimenté à Reuters.
La baisse des prix de l’aluminium en 2014, liée à une forte production face à une demande faible, avait été effacée par une hausse drastique des primes. Une situation paradoxale qui voit le prix de base baisser en regard des fondamentaux offre/demande, et les délais d’attente croissants pour sortir le métal en renchérir le prix. Résultat : les producteurs voient baisser leur prix de vente, et les consommateurs ne le ressentent pas. Tous sont vent debout contre le LME, qui contrôle une grande partie des stocks dans ses entrepôts.
En six mois, les prix ont encore baissé sous la pression de la dévaluation des monnaies des producteurs face au dollar, de la chute des prix du pétrole, d’une demande molle en Chine comme en Europe et du destockage initié par le LME. Même si on a vu que cette libération par le LME ne signifiait pas forcément une mise à disposition du marché : Vivienne Lloyd, analyste chez Macquarie, évaluait à deux-tiers la proportion d’aluminium restockée dans des entrepôts hors-LME. Ce qui prouve que certains négociants comptaient malgré tout profiter du spread entre les prix au comptant et les contrats à terme, qui leur permettrait de revendre plus cher, plus tard. Les primes, elles, ont finalement baissé dès le premier trimestre 2015 suite à une hausse notable des exportations chinoises en décembre. Et le prix de l'aluminium devrait remonter courant 2015 suite aux baisses de production annoncées par Alcoa et ses concurrents.
Et demain ? Les principaux producteurs sont en désaccord sur les prévisions : Alcoa prévoit un surplus, alors que Rusal considère la hausse des exportations chinoises comme temporaire et annonce un déficit sur 2015. L’aluminium reste décidément l’un des métaux sur lesquels l’offre et la demande sont les moins prévisibles…
Myrtille Delamarche
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