[Chronique RH] Et si l'inventeur du management des start-up était Français et s'appelait Jean-François Bizot
Il faut lire l’inclassable, la formidable biographe de Jean-François Bizot, écrite par Marina Bellot et Baptiste Etchegaray publié chez Fayard. Derrière le "il faut" ne voyez aucun impératif moral, mais plutôt un conseil amical. D’abord parce qu’il y quelque chose d’amusant à voir comment imperceptiblement l’état d’esprit d’une époque disparaît. Ainsi en est-il des années 80 que nous avons connues et qui semblent être à des années-lumière du monde d’aujourd’hui avec leur idéalisme soft. En effet, Jean-François Bizot est l’inventeur des médias branchés de la deuxième moitié du siècle passé : Actuel dans sa version 1 et 2, mais aussi Radio Nova et son ambition d’être la sono mondiale, soit la fréquence qui diffuserait à longueur de journée les musiques de monde les plus « in », pensant qu’en mixant les cultures on rapprocherait les peuples. RIP les années 80.
L'ingenieur de la sono mondiale
La biographie révèle un personnage vraiment étonnant, qui, soyons audacieux, a finalement inventé l’esprit start-up avant tout le monde. Bizot c’est un ingénieur et le fils de grands industriels lyonnais, avec des ascendants dirigeants Rhône Poulenc et siégeant au conseil consultatif de la Banque de France. Il part à la fin des années 60 dans la Californie (tiens tiens) où il découvre la drogues (enfin les drogues), l’amour libre et tout ce qui fait peu ou prou la mythologie alternative du San Francisco hippie, l’ancêtre des hackers. Il ressort de la lecture de ces pages que Bizot a baigné dans le bain de ce qui fera la Slicon Valley et qu’on en trouve des traces dans ses méthodes de management une fois revenu en France.
Car le fils de famille, devenu pape de la culture alternative et underground, va se muer en chef d’entrprise pas comme les autres. Il est amusant de lire que Bizot dans les années 70 a eu l’idée d’acheter une vaste propriété aux portes de Paris, où il souhaiter loger l’ensemble de son équipe de rédaction. On retrouve là sûrement des traces de paternalisme du capitalisme dont il est issu (famille venant du Nord et de Lyon), transformé en une sorte de "camaradisme", qu’on retrouve peu ou prou dans certaines start-ups contemporaines. En Californie, où nous étions en reportage l’an dernier, nous visitâmes (il paraît qu’il faut sauver le passé simple, ceci était notre contribution. FIN de la PARENTHESE) une start-up dans le quartier de Twin Peaks, où le fondateur logeait une partie de son équipe de développeurs. Avec ce même mélange d’altruisme et d’intérêt bien compris. En logeant les uns et les autres, il n’avait pas à payer des salaires aussi élevés motivés par le prix de l’immobilier local et, surtout, il avait sous la main une équipe qui semblait ignorer encore plus qu’ailleurs la notion de temps de travail….
Une vision obsessionelle
Surtout, Bizot le pionnier qui fit découvrir la musique black blanc beau à une jeunesse qui n’en pouvait plus des productions formatées du TOP 50 (à titre personnel, on ne lui dira jamais assez merci) possédait ce petit quelque chose qu’on retrouve chez de nombreux créateurs de start-up : une vision claire et non-négociable de leur projet. Là où maints élèves de grandes écoles devenues par le jeu d’alliances mouvantes dirigeants de grands groupes donnent l’impression de pouvoir passer du pétrole à l’agro alimentaire en passant par la grande distribution et la chimie, la puissance de tous les entrants semblent résider dans la concentration obsessionnelle de leur fondateur sur UN projet. Les auteurs d’Accélération, dans les coulisses de l’hyper croissance y reviennent longuement dans leur ouvrage.
La biographie de Jean-François Bizot rappelle toute la puissance d’’exécution d’un homme habité par une idée unique, mais aussi l’immense fragilité quand les vents semblent tourner. Bizot s’est toujours réinventé. D’autres n’ont pas un tel destin.
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