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Christine Lewicki : "Arrêter de râler pour ne plus être une victime"
Considérant que râler lui prenait trop d’énergie, la coach certifiée Christine Lewicki a décidé d’arrêter de se plaindre comme d’autres arrêtent de fumer. Elle en a tiré un blog et un livre qui vient d’être publié en collection de poche. Elle nous explique comment elle a fait mais aussi pourquoi cette décision d’arrêter est un moyen efficace pour revoir tout ce qui ne va pas dans sa vie professionnelle. Alors, prêts pour le changement ?
L’Usine Nouvelle - Vous avez publié aux éditions Eyrolles "J’arrête de râler", livre qui est désormais disponible en poche chez Pocket. Vous avez un blog sur le sujet. Pourquoi ? Le râleur n’est-il pas celui qui pointe les dysfonctionnements des organisations ?
Christine Lewicki - Arrêter de râler ne signifie pas acquiescer à tout, au contraire. La personne qui râle se met en situation de victime et très souvent pointe un coupable. Ce faisant, elle ne se place pas comme acteur du changement. Arrêter de râler ce n’est donc pas tout accepter, mais c‘est peut être dire clairement "ça ne marche pas", "ça ne me convient pas" et prendre les mesures pour que cela change. En outre, quand on se plaint, on exagère, on amplifie. Le petit problème devient insurmontable. On finit par se convaincre qu’on est entouré d’incompétents, qu’on doit tout faire, que rien ne va... Attention, je ne dis pas qu’une personne qui souffre au travail doit l’accepter, qu’il ne lui sert à rien de râler, mais que cela ne l’aide pas à trouver les moyens pour que ces souffrances cessent. Arrêter de râler c’est ne plus vouloir être une victime, c’est vouloir être bien et ne plus vouloir laisser le travail nous "bouffer".
Votre livre repose sur votre expérience. Qu’est-ce qui vous a amené à prendre cette décision ?
Comme coach, j’avais déjà observé que certains entrepreneurs que j’accompagnais passaient beaucoup de temps à râler, contre leurs salariés, l’Etat ou leurs clients. Pour moi, nous passions trop de temps en coaching sur ce sujet, alors que le but est d’activer les possibilités qu’il a en lui. Jusqu’au jour où j’ai observé que je faisais la même chose notamment dans ma vie privée, que j’étais, au fond, pareil qu’eux. Suivant le précepte de Ghandi : "Soyez le changement que vous voulez voir dans le monde", j’ai pris la décision d’arrêter de râler. J’ai alors réalisé que je passais trop de temps à le faire et que cela représentait une dépense d’énergie importante. Râler, c’était résister à ma vie, à mon quotidien.
Concrètement, comment avez-vous fait ?
Pour changer une habitude et la remplacer par une autre, il faut environ trois semaines, soit 21 jours. C’est un résultat établi par de multiples travaux, à quelques jours près. Il fallait donc arrêter de râler pendant 21 jours consécutifs. Pour m’aider, j’ai mis un bracelet et chaque fois que je me surprenais à râler je le changeais de bras. Le challenge était donc de le garder pendant trois semaines du même côté. Cela m’a pris quatre mois et demi.
Pourquoi, selon vous, les adultes râlent ? Faut-il voir un parallèle avec la colère de l’enfant impuissant ?
Il faudrait demander à un psy, ce que je ne suis pas. Cependant, je ne crois pas qu’il y ait un lien entre la "râlerie" et la colère de l’enfant. Ceci dit, nous vivons en tant qu’adulte dans l’illusion que notre réalité est LA réalité. C’est une envie très profonde. Résultat : on se lève le matin avec une liste de choses à faire, en espérant que les autres vont nous laisser faire, voire, pour les plus optimistes d’entre-nous, qu’ils vont nous aider. Or ils ont eux-mêmes leur propre liste de choses à faire. Tout ce qui nous gêne dans la réalisation de ce que nous avions prévu devient une source d’insatisfaction.
Nous approchons de la rentrée. Est-ce le bon moment pour arrêter de râler ? Peut-on espérer profiter de l’effet vacances ?
Le meilleur moment, c’est celui où on le décide. Il faut prendre conscience que râler nous coûte quelque chose. Si vous êtes persuadé que c’est bon, que ça vous aide à tenir, rentrée ou pas rentrée, vous n’êtes pas prêts. Pour arrêter de râler, il faut être convaincu que ça nous pollue la vie et décider de ne plus être victime de rien ni de personne.
Râler, est-ce un symptôme ? Le râleur est-il toujours une personne en souffrance ?
Non pas forcément. Il y a des gens qui vous disent qu’ils aiment râler, que c’est important pour eux. A chacun de se poser la question et de choisir.
N’a-t-on pas toujours tendance à penser que ce sont les autres qui râlent ? Autrement dit, réalise-t-on toujours son degré de "râlerie" ?
Nous sommes très mauvais juge. Quand je présente mon livre en dédicace, les gens me disent très souvent qu’ils comptent l’offrir à quelqu’un qu’ils connaissent et qui sera concerné. J’aime bien dire que la "râlerie" c’est comme la mauvaise haleine…
Votre propos est plutôt convaincant. Pourquoi, selon vous, certains continuent de se plaindre malgré tout ?
C’est toujours plus facile de râler que d’être acteur du changement. En outre, être râleur peut apporter des petits avantages. Quand on râle, on attire les autres. Autour de la machine à café, il y a quasiment une sorte de sociabilité qui se crée autour des râleurs. On échange ses motifs de râler. C’est un moyen puissant de se connecter les uns aux autres. Observez quand vous arrivez au bureau, combien de personnes râlent sur leurs difficultés de transport. C’est un moyen de lancer une conversation.
Pour revenir à votre expérience, quels bénéfices avez-vous tiré de ce changement ?
Je peux dire que cela a changé mon quotidien. J’ai développé un rapport plus fluide à ma vie. Quand quelque chose ne me convient pas, désormais j’utilise mon énergie pour le changer. J’ai aussi modifié ma façon de communiquer avec les autres. Cela a des résultats positifs. Quand vous voyez les autres comme des coupables, ils ont rarement envie de coopérer avec vous.
Propos recueillis par Christophe Bys
Pour ceux qui veulent creuser le sujet, lire 15 trucs pour arrêter de râler au boulot sur le blog de Christine Lewicki, et l'article en deux parties "Arrêter de râler au travail, rêve ou réalité" (partie 1 et partie 2).
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Christine Lewicki : "Arrêter de râler pour ne plus être une victime"
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