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Ces mesures de la feuille de route économie circulaire qui concernent les industriels

Sur les 50 mesures pour une économie 100% circulaire qui constituent la feuille de route présentée le 23 avril par le gouvernement, 38 concernent directement l’industrie. Décryptage des nouvelles contraintes et mesures de soutien annoncées.

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Ces mesures de la feuille de route économie circulaire qui concernent les industriels
Les propriétaires de véhicules hors d'usage devront présenter un certificat de destruction dans un centre VHU agréé pour résilier leur assurance.

La feuille de route pour une économie 100% circulaire dévoilée le 23 avril par le ministère de la Transition écologique et solidaire et présentée par le Premier ministre Edouard Philippe lors de sa visite dans l’usine Seb de Mayenne comporte 50 mesures regroupées en quatre axes : mieux produire, mieux consommer, mieux gérer nos déchets et mobiliser tous les acteurs.

Mieux produire

Sans surprise, les 7 mesures de cette première partie adressent directement l’industrie. Elles visent notamment à accompagner les entreprises afin qu’elles augmentent la part de matières recyclées dans leurs produits, principalement sous forme d’engagements volontaires. Les outils de la finance verte seront mobilisés sur l’investissement productif favorisant cet usage de matières régénérées, et les TPE-PME souhaitant rationaliser leur consommation de ressources et réduire leur émission de déchets seront accompagnées par l’Ademe via son dispositif "PME et TPE gagnantes sur tous les coûts". Les filières REP (responsabilité élargie du producteur, en charge de l’organisation de la collecte et du recyclage de certaines familles de produits et financées par l’éco-contribution des metteurs sur marché) devront quant à elles assumer le risque de prix lié à l’évolution des cours des matières secondaires en lieu et place des opérateurs du recyclage.

Enfin, la réforme du code minier, ce vieux serpent de mer qui se heurte à la faible acceptabilité de cette activité en France, doit être "engagée en 2018" car "l’engagement volontaire de la France dans l’économie circulaire permettra de réduire les besoins en matières premières minérales primaires, néanmoins il restera nécessaire d’en extraire". L’identification de compétences spécifiques liées au recyclage et la formation seront soutenues.

Mieux consommer

Cinq des 9 mesures incluses dans cette partie de la feuille de route concernent principalement l’industrie, mais toute la partie liée à une meilleure information des consommateurs sur l’impact environnemental, la durabilité et la réparabilité des produits entraînera immanquablement des obligations de mesure et d’étiquetage pour les industriels. L’objectif global est d’inciter, sous le contrôle de consommateurs mieux informés, l’industrie à fournir des pièces détachées et à renoncer à la tentation de l’obsolescence programmée comme modèle de pérennisation du marché.


Recyclage de téléphones portables chez Morphosis au Havre

Concrètement, cela passe par la fixation de taux de réemploi parmi les objectifs des filières REP (en plus des taux de recyclage), par l’extension aux équipements électriques et électroniques de la mise à disposition de pièces détachées issues de l’économie circulaire déjà imposée dans l’automobile, et par plusieurs obligations d’affichage sur la disponibilité de ces pièces et la réparabilité des produits. Les filières REP devront également mettre en place une modulation de l’éco-contribution pouvant excéder 10% du prix HT du produit selon son niveau d’éco-conception. Les auteurs de la feuille de route citent en exemple le groupe Seb et son logo "réparable sur dix ans", datant de 2015. Des études ont démontré depuis que 8% des consommateurs avaient opté pour un produit Seb qui n’était pas leur premier choix en raison de la présence de ce logo. Le fabricant d’électro-ménager a abaissé le prix de ses pièces détachées de 30% en 2012, et a pris l’engagement de rendre ces pièces disponibles au minimum 12 à 15 ans après l’arrêt de fabrication du modèle.

Mieux gérer nos déchets

Dix-huit des 24 mesures visant une meilleure collecte et une meilleure valorisation des déchets auront un impact direct sur les industriels. Parmi les plus notables, une adaptation de la fiscalité visant à rendre la mise en décharge et l’incinération non énergétique des déchets plus coûteuses que leur valorisation. Pour ce faire, un taux de TVA réduit à 5,5% sur la prévention, la collecte séparée, le tri et la valorisation matière des déchets sera mis en place. Mais seulement "dans le cadre du service public de gestion des déchets", soit... "pour les collectivités", décrypte Benoît Varin, vice-président de la Fédération du réemploi et co-fondateur de Recommerce (réparation et vente de téléphones portables reconditionnés). Pour compenser, une concertation sera lancée sur des hausses progressives de la TGAP (taxe générale sur les activités polluantes) avec un calendrier d’extinction des tarifs réduits sauf pour l’incinération à forte performance énergétique et l’élimination de déchets dangereux, tels les déchets d’activités de soins à risque infectieux (Dasri) et les déchets polluants, comme ceux contenant des substances polluantes organiques et les bois créosotés.


VHU chez Vincent Recyclage

Les véhicules hors d’usage, dont 500 000 sont traités ou exportés illégalement chaque année, font l’objet d’une attention particulière. Pour résilier son assurance, le propriétaire devra fournir un certificat de destruction du véhicule par un centre VHU agréé. La lutte sera renforcée contre les sites illégaux de traitement et permettra aux inspecteurs de l’environnement de les verbaliser et de saisir les véhicules stockés pour les remettre dans la filière légale.

Parmi les autres mesures de ce chapitre, la valorisation des biodéchets de qualité, notamment en fertilisants à destination de l’agriculture, sera encouragée et leur collecte facilitée par un soutien à la mise en place de flux séparés par les collectivités. De nouvelles obligations visent à lutter contre la pollution, comme l’installation obligatoire d’ici 2022 de filtres de récupération des particules plastiques sur les sites de production concernés. Avec le même objectif de non-dispersion, le gouvernement entend porter au niveau européen une interdiction de l’usage des plastiques fragmentables, des microbilles de plastique et des contenants en polystyrène expansé pour la consommation nomade.

Les filières REP se verront fixer de nouvelles ambitions, non-détaillées dans la feuille de route, mais visant à renforcer les moyens de leur contrôle. Elles se verront infliger des sanctions financières en cas de non atteinte des objectifs fixés (taux de collecte, de recyclage et de valorisation). Certaines verront leur périmètre élargi. Celui de la filière REP emballages sera étendu aux emballages professionnels, avec pour objectif de mieux collecter les bouteilles et canettes dans les cafés, hôtels et restaurants. La filière REP des déchets diffus spécifiques (DDS) des ménages devra traiter ceux des artisans. La filière véhicules hors d’usage, enfin, devra gérer également les véhicules à moteur non couverts (deux-roues, voiturettes…). De nouvelles REP feront leur apparition dans les secteurs des jouets, des articles de sport et de loisirs, et des articles de bricolage et de jardin. Un dispositif financier visera à augmenter la collecte des anciens téléphones portables pour réemploi ou recyclage. Le plan déchets bois, inscrit dans un contrat stratégique de filière et porté par les fédérations et éco-organismes concernés, est intégré dans la feuille de route économie circulaire.

Responsable de 70% des volumes de déchets émis en France avec 247 millions de tonnes par an, le secteur de la construction fera l’objet d’une réflexion spécifique pour aboutir à la gratuité de la reprise et éviter ainsi la mise en décharge (payante). L’une des options est la mise en place d’une filière REP dédiée, mais d’autres dispositifs sont envisagés.

La réglementation sur les installations classées, les déchets admis en stockage ou en incinération sera simplifiée et pourra faciliter, dans certains cas, la sortie du statut de déchets des produits en sortie de valorisation. Si l’échéance de ces révisions est fixée à la fin de l’année 2018, la feuille de route reste évasive sur les modalités et les détails de cette rationalisation. On y apprend tout de même que la procédure d’instruction des demandes de sortie du statut de déchet sera raccourcie via la fusion des consultations obligatoires et la suppression de la commission consultative sur le statut de déchet. Cette opération sera facilitée pour les matières fertilisantes (hors boues d’épuration), le bois, le plastique et les pièces récupérées pour réutilisation sur des produits en fin de vie. Enfin, les déchets devront pour être admis en décharge ou en incinération être accompagnés d’un certificat de tri préalable des matières valorisables.

Mobiliser tous les acteurs

Cette partie de la feuille de route économie circulaire s’appuie sur deux axes. Le premier est l’exemplarité de la commande publique (utilisation de pneus rechapés, de téléphones issus du réemploi, de 50% de papier recyclé, intégration des objectifs d’économie circulaire dans les appels d’offres…). Le second est la facilitation de la mise à disposition d’informations sur les gisements matières (entre autres grâce au numérique et au big data), la collaboration internationale pour leur valorisation, et le déploiement des filières REP dans les outre-mer.

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