Ce qu’il faut savoir sur le mystérieux Emmanuel Besnier, patron de Lactalis
Après plusieurs jours de conflit, les éleveurs et le groupe Lactalis viennent de trouver un accord sur le prix du lait. Durant toutes les négociations, le patron du numéro un mondial des produits laitiers, est resté plus que jamais enfermé dans le mutisme le plus complet, cultivant sa réputation de patron français invisible. Un credo porté de père en fils dans ce groupe familial.
Mis à jour
30 août 2016
"On le ne voit jamais. Je n'ai pas son portable", a lancé le ministre de l’Agriculture, Stéphane Le Foll, sur France Info ce lundi 29 août, à propos d'Emmanuel Besnier, le très discret patron du numéro un mondial des produits laitiers, le français Lactalis connu pour ses marques Lactel, Bridel, Président, Galbani ou encore Roquefort Société. Alors que son groupe cristallise les mécontentements des éleveurs depuis plusieurs semaines et a fait l’objet d’une opération très médiatique de blocage de son siège à Laval (Mayenne), le patron du géant familial, est resté aux abonnés absents de toute réunion, médiation et prise de parole, malgré les demandes répétées de rencontres des syndicats agricoles. Malgré les menaces de la FNSEA menace de bloquer une quinzaine de ses sites en France cette semaine, tout en appelant au boycott de ses marques dans les supermarchés. "Emmanuel Besnier ne m’a jamais demandé un rendez-vous, ni un contact, ni souhaité me rencontrer, a souligné Stéphane Le Foll. Il y en a beaucoup d'autres avec lesquels j'ai des relations ou que j’ai rencontrés, même Jean-Paul Bigard (ndlr : le PDG du groupe éponyme de transformation de viande français, réputé aussi pour sa discrétion)".
PDG de Lactalis à 30 ans
Qui est donc ce mystérieux Emmanuel Besnier, issu de la troisième génération familiale à la tête de ce groupe laitier familial, qui a réalisé 17 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2015 ? Âgé de 46 ans, cet homme, classé treizième fortune de France, fuit comme la peste la presse, les pouvoirs publics, voire la plupart de ses salariés, qui affirment ne "jamais avoir vu sa tête". Seules quelques photos, anciennes et se comptant sur les doigts de la main, circulent dans la presse. Certains parlent de son "côté paranoïaque". Le magazine "L’Expansion" relate qu'il assiste aux rencontres du Stade Lavallois, le club de foot de sa ville, "depuis sa loge derrière des vitres fumées". Pas de risque d’être vu ou pris en photo éventuellement par la presse.
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L’entreprise fondée par André Besnier en 1933 cultive depuis longtemps le goût du secret. Arrivé aux commandes du groupe en 1955, Michel Besnier, traumatisé par l'enlèvement d'Eric Peugeot en 1960, accompagne lui-même son fils Emmanuel à l’école, selon le magazine "Challenges". Propulsé en 2000 aux manettes du groupe, à seulement 30 ans, lors du décès de son père d'une crise cardiaque, Emmanuel Besnier suit plus que jamais la maxime du "Pour vivre heureux, vivons cachés".
Impossible de connaître les résultats financiers du groupe. Le géant laitier préfère payer des amendes chaque année, plutôt que de publier ses comptes. A une exception près. En 2011, Lactalis doit se résoudre à sortir du bois. Lors de l’opération publique d’achat (OPA) qu’il lance sur l’italien Parmalat, il doit publier son organisation et ses résultats détaillés pour respecter la réglementation boursière en vigueur. On y apprend que la famille Besnier est toujours actionnaire, directement ou indirectement du groupe Lactalis. Devenu numéro un mondial de son secteur avec cette opération, Lactalis ne republiera pas ses comptes ensuite. L’application prochaine de la loi Sapin 2 sur la transparence de la vie économique devrait changer les choses.
Par force, plus que par conviction, Lactalis pourrait finalement adopter une plus grande transparence. Mais pas sûr que cela suffise à redorer une image sérieusement écornée aujourd’hui aux yeux de l’opinion publique. Malgré la tempête, Emmanuel Besnier pourrait bien rester encore enfermé dans le mutisme...
Adrien Cahuzac
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