Bonus-malus et efforts des cadres au menu de la réforme de l'assurance chômage
Le Premier ministre a annoncé qu'un décret réformant l'Assurance chômage serait publié au printemps, pour une application des nouvelles règles dès cet été. Au menu, quatre priorités, dont un système limitant le recours abusif aux contrats courts et une baisse des allocations maximales que peuvent percevoir les cadres.
Le gouvernement n’a pas changé d’avis : il veut réformer l’assurance chômage pour limiter le recours abusif aux contrats courts par certaines entreprises. Après l’échec des négociations entre organisations syndicales et patronales, l’Etat reprend la main. La réforme se fera par un décret modifiant l’actuelle convention d’assurance chômage. Le Premier ministre a indiqué ce 26 février au matin, que ce décret serait publié au printemps, pour une mise en œuvre de la réforme dès cet été.
Responsabiliser les entreprises
L’instauration d’un bonus-malus reste au cœur des souhaits gouvernementaux. Pour Edouard Philippe, pour limiter le recours aux contrats courts, "personne ne nous a proposé à ce stade une meilleure solution que celle du bonus-malus", qui "reste donc sur la table". Objectif : "responsabiliser les entreprises", alors que "en quinze ans, le recours aux CDD de moins d’un mois a été multiplié par trois" et que dans 8 cas sur 10, les embauches de moins d’un mois concernent la même personne. Une "contrepartie", estime-t-il, aux souplesses et sécurité que les entreprises ont obtenues avec la réforme du droit du travail. "Nous pouvons désormais refaire du CDI et des contrats longs la norme à l’embauche", estime Edouard Philippe.
Le gouvernement est donc prêt à se fâcher avec les organisations patronales, farouchement opposées à un dispositif qui module les cotisations chômage des employeurs en fonction de leur taux de recours aux contrats très courts. Selon un proche de la ministre du Travail, "dans tous les secteurs professionnels, on a des pratiques d’entreprises très différentes ; il est faux de dire que ce n’est qu’une question de contraintes économiques. La pratique managériale est au moins aussi importante". Chez les traiteurs, le nombre de ruptures des contrats de travail rapporté au nombre de salariés va de 1 à 40 selon les entreprises ! Selon un conseiller ministériel, les usines d’une même entreprise, fabricant les mêmes produits, n'ont pas du tout le même taux de recours à l'intérim (de 20% à 40% des effectifs), selon les pratiques du directeur de l’usine ou de son DRH.
Plafonner l’indemnisation des cadres
Deuxième gros dossier de la réforme à venir : l’indemnisation chômage des cadres. En France, le plafond de l’indemnité est de 7750 euros bruts, montant le plus élevé d’Europe, même si les demandeurs d’emploi touchant cette somme sont très peu nombreux. Dans le viseur du gouvernement : les cadres les mieux indemnisés, qui sont aussi ceux qui restent le plus longtemps au chômage. "Même quand ils travaillent dans des secteurs en tension ou dans des bassins d’emploi qui recrutent", souligne un conseiller de la ministre du Travail.
Alors qu’en moyenne un demandeur d’emploi touchant une allocation de 2 000 à 3 000 euros reste 419 jours au chômage, celui qui perçoit plus de 5 000 euros y reste 575 jours. Les chiffres sont différents mais la tendance est la même en dressant ce décompte sans les chômeurs de plus de 55 ans, qui ont droit à une durée d’indemnisation plus longue.
Les services du ministère du Travail ont compté 200 000 demandeurs d’emploi percevant plus de 2 000 euros par mois, dont 60 000 touchent plus de 3 000 euros. Un décompte qui laisse présager que ce sont à ces demandeurs d’emploi que seront demandés des efforts. Le gouvernement pourrait abaisser sérieusement le plafond de 7 750 euros, ce qui permettrait de dégager des économies substantielles au régime - l'objectif de 1 à 1,3 milliard d'euros d'économies par an est maintenu. Ou rendre les allocations dégressives, pour tous les chômeurs ou seulement à partir d'un certain montant. Aucune piste n’est précisée pour le moment.
Corriger certaines règles d’indemnisation
Reste deux autres dossiers : corriger les règles d’indemnisation qui font que 20% des demandeurs d’emploi touchent une allocation supérieure à leur revenu moyen antérieur (un salarié ayant travaillé 15 jours par mois par contrats successifs pendant un an perçoit le double d’un salarié ayant travaillé à mi-temps); revoir les règles du cumul emploi/chômage, dont la dernière modification, en 2014, a entraîné un quasi-doublement de la part de demandeurs d'emploi cumulant pendant deux ans (passée de 9 à 16%).
La ministre du Travail rencontrera séparément les huit numéros 1 des organisations syndicales et patronales représentatives à partir de cette semaine, puis son cabinet recevra toutes les organisations syndicales et patronales, représentatives ou non, ainsi que les parlementaires. Un cycle de cinquante rencontres qui durera plusieurs semaines et permettra au Premier ministre de dévoiler ses solutions au printemps. Les demandeurs d’emploi se verront appliquer ces nouvelles règles dès cet été.
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