[Avis d'expert] Lubrizol, un an après : plus que des sanctions et inspections, développons notre culture de sécurité !

Un an après l'incendie de l'usine de Lubrizol, Philippe Billet, le directeur général Ascom France et Ibéria, revient sur le plan en matière de prévention des risques que le gouvernement a dévoilé fin septembre. Pour une culture de sécurité efficace, il prône un recours aux nouvelles technologies tant pour identifier les dysfonctionnements que pour améliorer la réactivité.

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[Avis d'expert] Lubrizol, un an après : plus que des sanctions et inspections, développons notre culture de sécurité !
Philippe Billet est directeur général Ascom France et Ibéria.

0 mort, 0 blessé, 0 bâtiment détruit… Mais 9 000 tonnes de produits chimiques partaient en fumée avec des conséquences sur la santé qui restent à ce jour encore incertaines. C’était le bilan, le 26 septembre 2019, de l’incendie de l’usine de Lubrizol près de Rouen. Un an après, le gouvernement vient d’annoncer un plan en matière de prévention des risques. Plus que jamais, les nouvelles technologies ont un rôle à jouer… Mais pas n’importe comment.

L’efficacité sécuritaire avec plus d’inspection et de sanctions ?

Si la cause exacte de l'incendie n'est toujours pas connue, l’investigation du Monde montre que l’incendie se serait potentiellement déclenché dans des entrepôts de l'usine voisine Normandie Logistique (qui ont également brûlés). A la différence de Lubrizol, celle-ci n’est pas classée "Seveso seuil haut" et est donc moins contrôlée.

Le gouvernement vient de détailler un plan spécifique. Celui-ci comporte cinq axes destinés à "mieux prévenir les risques d’incendie, améliorer l’alerte des populations en cas d’accident et garantir la transparence du contrôle des sites industriels". L’accent est particulièrement mis sur un renforcement des contrôles. Par exemple, pour limiter tout risque de propagation d’incendie entre des sites voisins par effet domino, les inspections des sites classés dans un rayon de 100 m des zones Seveso seront dorénavant systématiques. Des contrôles auront lieu de manière obligatoire "tous les ans" dans les sites Seveso seuil haut – qui présentent le plus de risques pour l’environnement et les humains –, et seront "renforcés" dans les sites seuil bas.

Être accompagné dans la complexité

Si, évidemment, les efforts vont dans le bon sens, cela est-il suffisant ? Non. Le développement de la culture de sécurité en entreprise, c’est-à-dire ici l’amélioration de la gestion de sites industriels, n’est pas une affaire ponctuelle. Il doit être continue au sein de l’usine et se concentrer sur… l’humain, premier facteur de risque. Si le gouvernement n’évoque pas de plan particulier pour accompagner les industriels vers une gestion du risque plus efficace au quotidien, c’est aux experts de la sécurité de prendre la main. Aujourd’hui, l’amélioration de la gestion du risque repose sur l’interaction de trois facteurs (technique, humain, organisationnel), ce qui rend sa gestion complexe. Le soutien apporté par un prestataire spécialisé a pour objectif de diminuer les craintes du manager industriel face au changement, en lui apportant une expertise pointue et adaptée à tout type de gouvernance et de structure, "Seveso" ou non.

Car si le chef d’entreprise est responsable en cas d’incident, les moyens et les équipements qu’il doit mettre en place afin de limiter les accidents ne sont pas précisés par la loi. Il n’est pas guidé et cela reste vague. Pourtant, pour être efficace, la culture de sécurité doit être impulsée par la direction qui doit mettre en place une communication fluide et intelligente entre tous les acteurs de l’entreprise pour permettre une meilleure réactivité lors d’incidents.

La technologie pour plus de réactivité et de simplicité

Soyons clairs néanmoins : la sécurité ne sera jamais une science infaillible parce que le facteur humain reste le facteur essentiel du risque. Depuis 20 ans, la problématique de sécurité dans l’industrie repose sur la réactivité, pièce maîtresse de la culture de sécurité industrielle. En améliorant la réactivité des équipes face à un accident, on peut réduire significativement son impact. Améliorer cette réactivité, c’est mettre à disposition un équipement performant et fiable qui permettra aux salariés d’alerter immédiatement et efficacement d’abord – on parle notamment des dispositifs PTI (protection du travailleur isolé) et Dati (dispositif d’alarme pour travailleur isolé) –, mais surtout mettre à contribution l’utilisateur.

Quand une alarme intervient, le procédé de traitement de l’information doit être connu et assimilé : l’utilisateur doit être impérativement formé car en cas d‘accident chaque minute compte ! Le salarié doit accepter les nouvelles contraintes et comprendre qu’il ne s’agit pas d’une réduction de sa liberté ou de son indépendance. C’est d’autant plus important que le travailleur n’est pas toujours conscient du danger, l’activité du site industriel nécessitant parfois la culture du secret.

Et la technologie vient améliorer cette réactivité ! Aujourd’hui la tendance est à la supervision centralisée des alarmes, à travers des dispositifs logiciels en SaaS pour minimiser les coûts, compatible avec les smartphones professionnels ou tablettes pour une supervision à distance des alertes de sécurité ou alarmes techniques. L’objectif est alors de renforcer la mobilité des collaborateurs en diffusant des messages d'alerte en temps réel, à la bonne personne, au bon moment, en fonction de scénarios préenregistrés. Avec ce type de dispositif, l’enjeu est simple : localiser une alarme en quelques secondes, généralement sur des plans interactifs d’un bâtiment, afin d’améliorer le temps de réaction. Et dans le cas où l’incident est critique, comme à Lubrizol, de simples clics permettent d’alerter massivement tous les collaborateurs… mais aussi les services de sécurité, gendarmeries, pompiers prévus dans le dispositif en amont.

La technologie pour apprendre de ses erreurs

Enfin, il est important de dire que le plan du gouvernement met également l’accent sur le retour d’expérience ou la transparence en rendant publics les rapports d’inspection rédigés par les inspecteurs des Dreal [les directions régionales de l'Environnement, de l'Aménagement et du Logement] par exemple ou encore en créant un bureau d’enquête spécifique. Et là encore, la technologie au sein des sites industriels a un rôle à jouer.

Les logiciels actuels liés à la gestion du risque disposent d’outils statistiques qui permettent de collecter les données des interventions pour en extraire ensuite les informations les plus pertinentes. Objectifs : identifier les dysfonctionnements dans les process, améliorer les performances de l'établissement et la prise de décision.

Dans ce cadre encore, pour donner les clés de compréhension aux industriels, le rôle du fournisseur de technologie est plus que jamais essentiel pour soutenir les plans de gestion de risques et diminuer les craintes du manager face au changement, en lui apportant une expertise pointue et adaptée à sa structure. Parce qu’on ne joue pas au petit chimiste avec la sécurité.

Par Philippe Billet, directeur général Ascom France et Ibéria

Les avis d'expert sont publiés sous la responsabilité de leurs auteurs et n'engagent en rien la rédaction de L'Usine Nouvelle

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