Au Maroc, Lafarge et Holcim lancent enfin leur fusion pour créer un poids lourd du ciment sous la houlette du holding royal SNI
Lafarge Ciments et Holcim Maroc ont annoncé le jeudi 17 mars leur fusion au Maroc. Le nouvel ensemble LafargeHolcim Maroc, coté à Casablanca aura comme actionnaire de référence une joint-venture à parts égales entre le groupe LafargeHolcim et la holding de la famille royale SNI associé de longue date à Lafarge. Dominant sur le marché marocain, LafargeHolcim va par ailleurs se doter d'une filiale commune avec la SNI pour exporter et se développer en Afrique francophone.
Pour le meilleur ? Après avoir fusionné presque partout au plan mondial, Lafarge et Holcim franchissent l'une des dernières étapes de ce processus en regroupant leurs filiales au Maroc dans la nouvelle société LafargeHolcim Maroc.
Information importante, la SNI, holding privé de la famille royale du Maroc associé depuis des décennies à Lafarge au Maroc, va demeurer un actionnaire important, indirectement à plus de 30% du futur ensemble.
C'est ce qui vient d'être annoncé via un communiqué publié ce jeudi 17 mars. Le rapprochement donnera naissance à une entité qui sera de loin leader du ciment au Maroc. Ce projet devrait se concrétiser au troisième trimestre, un temps nécessaire car les deux entités en cause sont cotées à la bourse Casablanca.
Au terme d'une opération complexe, dont certaines modalités restent à préciser, la société marocaine Lafarge Ciment va intégrer par fusion-absorbtion Holcim Maroc. Ce "sur la base d’une parité d’échange égale à 1,20 action Lafarge Ciments pour 1 action Holcim Maroc".
Pour rappel, jusqu'ici, Lafarge Ciment était détenue à 69% par Lafarge Maroc, sorte de sous-holding lui même contrôlé à 50-50 par la SNI d'une part et le groupe Lafarge de l'autre. Ces deux actionnaires détenant donc indirectement environ 35% de la société opérationnelle Lafarge Ciment.
Sans réajustement, la fusion Lafarge Holcim au Maroc aurait eu pour effet de fortement diluer la SNI.
Mais la fusion sera donc "accompagnée d’un rééquilibrage, réalisé par une cession à la SNI de la moitié des actions nouvelles LafargeHolcim Maroc reçues par LafargeHolcim à l’issue de la fusion", selon le communiqué.
La SNI en versant du cash va détenir une part de 50% dans la société de contrôle de la future LafargeHolcim Maroc, et ce à parité avec LafargeHolcim.
Bref, contrairement au cas de figure de ses anciennes filiales, Centrale Danone, Lesieur Cristal ou Biscuits Bimo respectivement cédées à Danone, Avril ou Mondelez ces dernières années, la SNI veut donc garder les pieds dans le ciment tout comme dans l'acier (elle est actionnaire aussi en JV ArcelorMittal du sidérurgiste Sonasid).
C'est là, indique le communiqué une première concrétisation de l'évolution de la SNI vers un fonds d’investissement panafricain à long terme, annoncée fin 2014
Au final, l'actionnariat de LafargeHolcim Maroc sera donc constitué par une part majoritaire, à savoir 65% par Lafarge Maroc, elle même détenue à 50/50 par LafargeHolcim Monde et la SNI. Le solde du capital sera détenu par des minoritaires et surtout coté en bourse.
L'ensemble restera la première capitalisation boursière industrielle de la place de Casablanca, comme l'était Lafarge Ciment.
Au jour de cette annonce, la capitalisation cumulée des deux groupes à Casablanca dépassait les 38 milliards de dirhams (3,5 milliards d'euros), dont 9 milliards pour Holcim Maroc qui était détenu à 43% par Holcim.
Le nouvel ensemble sera surtout un poids lourd sur le marché marocain du ciment. Le chiffre d’affaires combiné des deux sociétés représentera plus de 8 milliards de dirhams, dont nviron 35% pour l'ex-Holcim, sur un marché extrêmement rentable où les marges nettes dépassent régulièrement 15%
Selon une étude d'Attijariwafa Intermédiation parue l'an dernier, la capacité de production du nouveau groupe représente à elle seule environ 56% de celle du Maroc tout entier soit 11,2 millions de tonnes sur un total de 19,9 millions de tonnes. LafargHolcim Maroc détiendra notamment 6 cimenteries ou une trentaine de centrales à béton (présent dans la plâtre le groupe est par ailleurs en train de rapprocher cette activité de celle de Saint-Gobain au Maroc).
Cette fusion avait en 2015 reçu l'accord du gouvernement marocain sans enquête préalable sur la concurrence, et ce juste avant une réforme du Conseil de la concurrence élargissant les pouvoirs de cette autorité.
A ce futur poids lourd, la donne du marché va changer pour les autres acteurs, à savoir Ciments du Maroc (Italcimenti/Heidelberg), Ciments de l'Atlas du groupe marocain Sefrioui ou encore Asment Temara du groupe brésilien Votorantim. Des cessions de sites du nouvel LafargeHolcim Maroc ne sont pas à exclure. D'autant que le marché du ciment, 14,2 millions de tonnes en 2015, fait du surplace depuis trois ans.
L'autre volet de l'annonce du 17 mars est la création d'une filiale de Lafarge Maroc (la société commune LafargeHolcim - SNI) ciblant les marchés africains francophones : Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Gabon, Mali, Mauritanie, RDC, Congo et Sénégal.
Dénommée LH Maroc Afrique cette filiale permettra de "s’appuyer sur l’engagement de SNI dans les pays d’Afrique subsaharienne francophone pour accélérer son développement dans cette zone" souligne le communiqué.
Elle va "investir dans la production de ciments et de clinker et développer des synergies avec LafargeHolcim Maroc notamment à travers l’exportation de clinker ou de ciment à partir du Maroc". Une stratégie en droite ligne avec le fort déploiement de la diplomatie économique marocaine au sud du Sahara.
A noter que Lafarge, par ailleurs déjà très présent en Afrique, avait regroupé en 2014 une partie de ses filiales notamment celles, importantes du Nigéria et d'Afrique du sud au sein de la société Lafarge Africa, cotée à la bourse de Lagos. Sur le fief de Dangote, le véritable empereur du ciment sur le continent.
N.D. et P.-O.R.
Lafarge Ciment détient trois cimenteries. Celle de Bouskoura en périphérie de Casablanca est la plus grosse du pays (3 millions de tonnes) à quoi s'ajoutent Meknès, Tétouan ainsi qu'un centre de broyage à Tanger et ses filiales Lafarge Bétons et Lafarge Granulats. Holcim Maroc exploite trois cimenteries à Oujda, Fès et Settat, au sud de Casablanca. Il dispose aussi d’un centre de broyage et d’ensachage à Nador sur la côte nord et une unité d’ensachage à Casablanca.
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