Au Brésil, bataille au sommet entre les entreprises de la beauté
Troisième marché cosmétique au monde, le Brésil attire les multinationales et de nombreuses marques françaises de la beauté. Mais ses propres entreprises peinent encore à partir à l’export.
A Noël comme en plein été, à Sao Paulo, les salão, ces salons de beauté où l’on vous coiffe et peint les ongles des orteils simultanément, font carton plein. A tel point qu’il y en aurait un pour 350 habitantes à l’échelle du pays ! Bienvenue au Brésil, "troisième marché de la beauté dans le monde, et même le premier en fragrances et déodorants, et deuxième en produits pour les cheveux", annonce Manoel Simões, le directeur exécutif du puissant syndicat brésilien de l'industrie des parfums, cosmétiques et produits de toilette (ABIHPEC).
Dans ce pays, le culte de la jeunesse, les métissages et le pouvoir d’achat grandissant de la population, ont permis au marché de la beauté de croître de 10% par an ces dix-huit dernières années, atteignant 10,7 milliards d’euros en 2013. "Même si le Brésil reste un des pays les plus inégalitaires au monde, ses habitants sont avides de consommation et n’hésitent pas à payer en deux, trois, voire quatre fois leurs crèmes et parfums", observe Cristina Afonso, la responsable du département biens de consommation hors alimentaire d’Ubifrance à Sao Paulo.
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Quand les Français "tropicalisent" leurs cosmétiques
Les Brésiliens consomment avidement les produits de mass market. Malgré la myriade de PME locales, les multinationales de la beauté ont envahi les lieux. Si les entreprises brésiliennes Natura Brasil et Boticario, toujours en tête des ventes, ont su tirer parti des spécificités du pays - le succès de la vente directe pour Natura, et un maillage étroit de magasins pour couvrir l’immensité du territoire pour Boticario - elles sont suivies de près par les géants occidentaux : Unilever, P&G, Avon et L’Oréal. Ces derniers produisent en grande majorité sur place, ayant construit leurs propres usines, et collent au plus près des produits du consommateur brésilien.
"Ils tropicalisent leurs produits car certains ont été conçus pour l’Europe, où la peau est plus sèche, mais cela ne marche pas ici : le climat fait dégouliner le maquillage !", rappelle Daniel Oliveira, business intelligence manager de l’ABIHPEC. Ainsi, alors que le français L’Oréal poursuit les investissements dans son centre de recherche de Rio de Janeiro, son compatriote L’Occitane a développé une gamme "L’Occitane au Brésil" à partir de la biodiversité locale, fabriquée par des partenaires régionaux. Le succès a été tel qu’il a décidé de l’exporter en Asie ! Petit à petit, les boutiques d’autres marques hexagonales pointent leur nez au Brésil : Sephora, Caudalie, Yves Rocher…
Tirer parti de la biodiversité et monter en gamme côté brésilien
A contrario, les champions brésiliens sont encore rares à quitter leurs terres. Les raisons ? Une taille critique insuffisante et un manque de compétitivité, les coûts de fabrication au Brésil restant extrêmement élevés à cause du déficit en infrastructures et de la complexité des taxes, selon Cristina Afonso. Résultat, le déficit de la balance commerciale du secteur se creuse... L’ABIHPEC évalue le manque à gagner à 412 millions de dollars en 2013, alors que les exportations représentaient 783 millions. Pourtant, l’association se bat pour réduire les obstacles réglementaires. Multipliant les discussions avec le gouvernement et l'Agence brésilienne de surveillance sanitaire. Tandis qu’un projet mené avec l'Agence brésilienne pour la promotion des exportations et des investissements, Beautycare Brazil, vise à soutenir l’internationalisation de leurs entreprises.
"Grâce à notre biodiversité, nous disposons d’excellents ingrédients comme le jojoba que le monde entier regarde, insiste Daniel Oliveira. En utilisant de nouvelles technologies, nous développons maintenant de très bons produits pouvant être de qualité comparable aux cosmétiques européens ou japonais !" Reste que "le secteur cosmétique ne fait pas partie des priorités du gouvernement brésilien, plutôt axé sur l’éducation, la santé ou les biotechnologies dans lesquelles il a beaucoup investi", estime Cristina Afonso. Pas de quoi cependant arrêter la croissance du marché de la beauté brésilien. Qui espère bien devenir le deuxième marché mondial sous peu…
Gaëlle Fleitour
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