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Arnaud Montebourg scelle la reprise de la papeterie M-Real
Le ministre du Redressement productif se rendait mercredi 23 janvier à Alizay (Eure) pour officialiser la reprise de la papeterie M-Real par le groupe Double A. Une entreprise thaïlandaise qui va devoir assurer la compétitivité du site.
Justin Bieber ? Le pape ? Brad Pitt ? Non, l’homme qui provoque cette indescriptible cohue est bien Arnaud Montebourg. Le ministre du Redressement productif a pour le moins réussi à attirer l’attention en se rendant sur le site normand de la papeterie de M-Real. "Pour une fois qu’on a des bonnes nouvelles, on est content", clame dès les premières minutes, et avec le sourire, un Arnaud Montebourg plus habitué aux délocalisations qu’aux reprises de sites industrielles. Et en la matière, cette papeterie qui affleure la Seine semble exemplaire de la lutte contre la désindustrialisation.
Pour quelle raison ? L’usine a bénéficié, selon les propres termes du ministre, d’une "micro nationalisation locale temporaire". Le conseil général de l’Eure en aura en effet été propriétaire pendant… une heure. Rachetée au groupe finlandais M-Real, qui l’avait mise à l’arrêt depuis avril 2012, la papeterie est passée en un temps record dans les mains du département qui l’a revendue dans la foulée, quelques heures avant la venue du ministre, au groupe thaïlandais Double A.
Montant de la transaction : un peu plus de 22 millions d’euros, dont 18 pour l’usine proprement dite. Le département a également fait l’acquisition, pour près de 4 millions d’euros, d’une surface foncière destinée à être transférée à l’établissement public foncier de Normandie. Avec pour objectif à terme de vendre ces terrains à de nouvelles entreprises et favoriser ainsi la redynamisation du territoire. En un mot, l’ambiance est à la fête malgré le ciel chargé devant ce qui semble être une réussite partagée.
"Un travail de bénédictin"
"Petroplus" ! "Florange" ! Au vu du succès entériné ce jour, les syndicalistes tentent, en hurlant ces mots à l’arrivée d’Arnaud Montebourg, de lui faire comprendre qu’il est attendu comme le messie sur ces deux dossiers brûlants… Dans son discours, le ministre parle de sa volonté que la papeterie d’Alizay "contamine" le reste de l’industrie et incite l’émergence de solutions de reprises viables. Et d’avouer quelques minutes plus tard qu’il s’agit d’un "travail de bénédictin", un "travail ingrat".
"Je suis satisfait, affirme Patrick Bauret, secrétaire fédéral filpac-cgt. La production va reprendre son plein régime par étapes." Si les salariés semblent plutôt de bonne humeur, c’est qu’ils ont le sentiment d’avoir éviter le pire. Alors que l’usine employait près de 330 salariés, Double A prévoit d’embaucher dans un premier temps 150 personnes. L’effectif pourrait ensuite passer à 200, voire 250 salariés avec la montée en puissance de l’usine.
Un soulagement qui s’explique aussi par la durée de l’engagement de certains salariés pour éviter la fermeture pure et simple de la papeterie. "C’est une nouvelle page qui commence, explique Nathalie Verdeil, secrétaire générale CGT-Union départementale Eure. Aujourd’hui, nous goûtons la concrétisation de trois années de lutte". Et de rappeler que M-Real avait dès 2009 annoncé son intention de vendre l’usine. Année où l’industrie papetière européenne, et française en particulier, commença à subir de plein fouet la chute de la consommation de papier.
Une collaboration inédite
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Puis M-Real a affirmé, en 2010, sa volonté de fermer l’usine si aucune proposition de reprise n’émerge. Deux ans plus tard, après diverses actions, luttes et grèves, le site est mis à l’arrêt. Dès lors, pour éviter un échec total, une "équipe de résindustrialisation" est mise en place afin de trouver une solution alternative, regroupant diverses parties prenantes (salariés, syndicats, mairie d’Alizay, département de l’Eure, chambre de commerce et d’industrie…).
Le Ministre du Redressement productif n’aura d’ailleurs eu de cesse durant son déplacement de rendre hommage à cette collaboration inédite, évitant ainsi toute récupération grossière qui n’aurait pas été du goût des salariés. On devine malgré tout en creux dans les discours des salariés présents que les discussions n’ont pas toujours été faciles pour parvenir à un tel résultat…
"Le projet initial de reprise était global et visait à diversifier les produits du site", rappelle Nathalie Verdeil. Matériaux d’isolation, pellets pour le bois-énergie, biocarburant en lien avec l’usine toute proche d’ici de Petroplus… Au début, salariés et élus voient grand. Mais faute de repreneur capable de porter un tel projet, c’est finalement l’entreprise Double A, présente commercialement dans 120 pays, qui emporte le morceau. Pour elle, c’est un joli coup : elle s’implante industriellement pour la première fois en Europe, zone où les papetiers du Nord de l’Europe règnent en maîtres.
Une centrale biomasse ultra rentable
Mais comment cette entreprise asiatique de 3 000 salariés créée en 2000 compte rendre compétitif ce site quand l’un des géants du papier n’y est pas parvenu ? Tout d’abord, Double A mise sur la production de papier haut de gamme. Un positionnement qui devrait favoriser la différenciation dans un marché en situation de surcapacités. "Nous visons l’ensemble du marché européen mais aussi le Moyen-Orient, explique Yothin Dumnernchanvanit, président de Double A. Cependant, nous savons que cela ne va pas être facile étant donné le contexte économique".
Deuxième levier pour le groupe : la partie de l’usine qui produisait de la pâte à papier à partir du bois va être définitivement arrêtée. La stratégie du thaïlandais pour se fournir en matière première : importer cette pâte par bateau depuis la Thaïlande pour en assurer la transformation dans l’atelier de l’usine normande. Des tests ont déjà été effectués ces derniers mois pour s’assurer de la faisabilité de ce nouveau business model.
Troisième carte à jouer : une centrale biomasse existante qui, en situation largement surcapacitaire, va permettre au groupe d’alimenter son site en électricité et en vapeur, mais aussi de vendre tout le surplus à EDF. "Cette revente de l’électricité, qui n’était pas possible auparavant en raison d’un verrou administratif, va compenser les fluctuations de la vente de papier", assure Patrick Bauret. La centrale en question, pour laquelle Neoen (groupe Direct Energie) s’est déclaré intéressé et poursuit les négociations avec Double A, a finalement été également achetée par le thaïlandais. Le groupe voit là un moyen d’améliorer la rentabilité à plus long terme.
Double A lorgne aussi sur les capacités de développement du futur port fluvial qui sera construit près de l’usine, à mi-chemin donc entre Paris et le port du Havre. Après ces festivités, pour ce groupe thaïlandais qui cristallise les espoirs de tout un territoire économique, tout reste encore à faire.
Olivier James
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