Arkema prend le large

Au sein de l'équipe de course Team Arkema Lalou Multi, le chimiste tricolore vient de s'engager dans l'aventure de la Mini-Transat. Le bateau Arkema 3 a pris la mer, le 1er octobre, depuis La Rochelle pour la Martinique. À bord, des matériaux innovants et recyclables participent aux performances de ce prototype unique en son genre.

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Arkema prend le large

Il va traverser seul l'Atlantique. Avec l'ambition de mettre moins de temps que les 80 autres concurrents. Ne faisant qu'un, le bateau Arkema 3 et son jeune skipper Quentin Vlamynck ont pris la mer, le 1er octobre, depuis La Rochelle, direction la Martinique, avec une escale prévue aux Canaries. La Mini-Transat, dont c’est la 21e édition en 40 ans d’existence, est l'une des courses au large les plus folles. Les concurrents s'embarquent sur des voiliers de 6,50 mètres seulement, sans contact avec leur équipe à terre, et ne reçoivent qu'un seul bulletin météo par jour, à 11 heures. Un bulletin qu’il ne faut pas rater sous peine de naviguer sans prévision de vent ni de temps pendant les 24 heures suivantes. Cette course hors norme est taillée pour les aventuriers et les futurs grands noms de la course au large. Pour la très grande majorité des concurrents, il s'agit d'ailleurs de leur première transatlantique en solo. La flotte se compose de deux catégories de bateaux : ceux de série et la classe, plus technologique, des prototypes. C'est à cette dernière qu'appartient Arkema 3. Après une première traversée en 2015 sur un bateau de série loué (Arkema 2), Quentin Vlamynck barre cette fois un navire flambant neuf, un « laboratoire et un concentré d'innovations », se félicite Thierry Le Hénaff. Aux premières loges pour le baptême, le 29 septembre à La Rochelle, le p-dg d'Arkema semblait partagé entre excitation et fierté. Car le projet sportif et technologique porté par l'équipe Team Arkema Lalou Multi est « à l'image du groupe : tourné vers l'innovation et la performance », sourit Thierry Le Hénaff. Entre La Rochelle et la ville du Marin, en Martinique, le bateau n'emporte pas seulement les couleurs du groupe, mais plusieurs de ses résines et adhésifs innovants.

Démontrer la performance des matériaux à travers une aventure sportive

Du côté d’Arkema, les voix sont unanimes. Cette aventure découle d'une rencontre forte, celle avec Lalou Roucayrol, un skipper haut en couleur et spécialiste de la course au large. « L'origine du projet remonte à 2012, raconte Daniel Lebouvier, directeur business development Adhésifs structuraux de Bostik. Nous avons rencontré Lalou pendant la construction de son trimaran, autour de nos colles, en tant que fournisseur, et aussi pour notre Altuglas ShieldUp (résine PMMA, ndlr). C'est là que j'ai compris aussi que Lalou cherchait un partenaire. » L'idée d'un partenariat s'est articulée sur la démonstration de la performance des matériaux du groupe à travers une aventure sportive. « C’est ce qui a fait sens », commente Daniel Lebouvier qui assure la coordination technique entre le groupe et l’équipe de course. Un premier contrat est signé en 2013, suivi d'un second, sur la période 2015-2018, entre le groupe et l'équipe.

La collaboration s'amorce d'abord autour du trimaran de 50 pieds (Multi50). Dans le cadre des applications adhésifs développées sur ce multicoque, Arkema se rapproche de la société girondine AEC Polymers (aujourd'hui intégrée à Bostik) pour trouver les solutions et produits adéquats. À bord, Arkema place des plaques acryliques nanostructurées (Altuglas ShieldUp) pour les surfaces vitrées, des mastics-colles d'étanchéité (Bostik ISR) pour le collage et le jointage de l'accastillage fixe du trimaran, et des adhésifs méthacrylates structuraux (gamme SAF) pour l'assemblage des renforts des coques. Les deux premières années de collaboration sont marquées par des succès, comme une très belle 2e place dans la catégorie des Multi50 dans la Route du Rhum en 2014, mais aussi par des désillusions, comme le chavirage dans la Transat Jacques Vabre en 2013. Surgit alors un autre projet : la construction d'un prototype Mini. Après avoir confirmé ses capacités de skipper au large dans la Mini-Transat 2015, Quentin Vlamynck revient fin 2015 « remettre les mains dans la colle » pour ce projet. L'équipe a su convaincre Arkema, mais le chimiste veut aller encore plus loin cette fois. « Thierry Le Hénaff nous a dit : faites ce que vous voulez mais la coque et le pont doivent être en Elium », se souvient Quentin Vlamynck. Cette résine innovante d'Arkema est décrite comme la première résine thermoplastique liquide pour la fabrication de pièces composites. Dotée de propriétés mécaniques similaires à l'époxy, résine de base pour les bateaux de course, elle n'est, par contre, pas thermodurcissable mais thermoplastique. Ce qui la rend post-formable et recyclable. Le projet est inédit pour un bateau de course. Un vrai défi.

"L'équipe de construction a adapté le procédé, nous avons adapté la chimie"

Pendant près de deux ans, l'équipe de construction travaille étroitement avec le Groupement de recherche de Lacq (GRL), un des centres névralgiques de la R&D d'Arkema. Les allers-retours se multiplient entre les chercheurs, l'équipe de construction du Mini et l'architecte Romaric Neyhousser. Une période dense, peuplée d'avancées mais aussi de doutes. Pour des pièces d'une telle taille, le procédé d'infusion a dû être mis au point, tout comme la réactivité de la résine. Pierre Gérard, expert Polymères de spécialité et additifs du GRL, estime que la réussite tient « au développement conjoint du procédé et de la formulation. L'équipe de construction a adapté le procédé, nous avons adapté la chimie ». Après des mois de travail et plusieurs essais sur différents échantillons, l'équipe entreprend finalement le très délicat moulage de la coque. Avec « succès pour cette première mondiale », se satisfait Pierre Gérard. Quentin Vlamynck évoque de son côté une « coque magnifique, qu'on a pu démouler après deux heures seulement ». Tous les participants au projet se félicitent de cette collaboration qui a permis d'avancer plus vite, et que tous jugent particulièrement enrichissante. Jean-Luc Arnaud, chef de chantier qui construit « des bateaux de course depuis 20 ans », avoue que c’était la « première fois qu’on faisait de la R&D. On était au cœur du produit ». Réussir la conception d’aussi grandes pièces ouvre aussi d’autres horizons à la résine Elium. Le GRL travaille ainsi particulièrement sur les applications dans l’éolien.

Au final, Arkema 3 est unique en son genre. Seul bateau de la Mini-Transat doté d'une coque et d'un pont entièrement recyclable, il emporte aussi des adhésifs et le PMMA du chimiste de spécialités. Au-delà, le bateau dispose d'un sacré panel d'innovations techniques sur lesquelles Arkema n'a pas encore pu contribuer, comme une voile épaisse inspirée des ailes des voiliers de la Coupe de l'America, une étrave arrondie qui améliore la stabilité aux allures portantes, ou encore un système de foils orientables. Des innovations qui lui permettent, dans certaines conditions, de voler sur les flots. S'il n'est pas favori, Arkema 3 est un sérieux outsider pour la Mini-Transat. Tandis qu'il vogue vers la Martinique, l'équipe Team Arkema Lalou Multi s'affaire pour le départ de la prochaine Transat Jacques Vabre, une course mythique à deux navigateurs, qui partira le 5 novembre du Havre pour rejoindre Salvador de Bahia, au Brésil. Et en 2018, le Multi50 Arkema 1 devrait s'aligner sur la prochaine Route du Rhum. Dans les deux cas, il y a de vraies ambitions de victoire. À terre, le groupe suivra toutes ces courses de très près, tout en continuant de peaufiner ses matériaux.

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