Arianespace : Airbus et Safran prennent le pouvoir pour relancer la fusée européenne
Matignon doit valider mercredi 10 juin la cession des parts du Centre national d'études spatiales (Cnes) dans Arianespace au profit d’Airbus Safran Launchers.
Les industriels ont désormais tous les leviers pour répondre au défi imposé par l'américain SpaceX sur le marché des lancements commerciaux.
Mis à jour
10 juin 2015
En prenant le contrôle d’Arianespace, grâce au rachat des 34% détenus par le Centre national d'études spatiales (Cnes), Airbus Safran Launchers s’impose comme le patron incontesté et incontestable de la filière spatiale européenne. Il s'est engagé à maintenir les effectifs d’Arianespace, sa marque et son siège à Evry (Essonne).
gagner en réactivité
Airbus et Safran contrôleront désormais la politique commerciale des lanceurs européens, Ariane en tête. C'est le levier qui leur manquait pour faire face à la concurrence de l'américain SpaceX et ses lancements à prix cassés. Cette nouvelle organisation, plus réactive, rend possible un contact direct avec les grands opérateurs de satellites. Et avec une seule entité décisionnaire, les campagnes de lancement depuis le Centre spatial guyanais de Kourou seront également accélérées.
Pour tous les industriels européens du spatial, le temps était compté : la commercialisation d’Ariane 6 démarrera à la mi-2016, pour un premier vol programmé en 2020. D’ici là, Airbus Safran Launchers va devoir s’engager sur des prix fermes vis-à-vis de l’Agence spatiale européenne.
Trois entités pouvaient prétendre au leadership de la gouvernance du spatial européen : les agences spatiales, et notamment le Cnes qui définit la stratégie spatiale de la France depuis cinquante ans, Arianespace, avec sa marque mondialement connue, qui assure la commercialisation des lanceurs Ariane mais également Soyouz et Vega depuis Kourou et enfin les industriels, avec en tête Airbus, le maître d’œuvre d’Ariane, et son motoriste Safran.
Les industriels ont su unir leurs forces.
Airbus et Safran, qui totalisent à eux seuls environ 60% de la valeur industrielle du lanceur européen, sont en train de fusionner leurs actifs dans le secteur spatial. D’ici 2016, ils auront rassemblé l’ensemble de leur effectifs et moyens industriels concernés par leurs activités spatiales civiles et militaires. Soit un ensemble de 8000 personnes. L’initiative avait séduit au plus haut niveau de l’Etat : la publication des bans du mariage avait été faite il y a un an depuis le Palais de l’Elysée avec la bénédiction de François Hollande.
Dans la foulée de leur société commune, Airbus et Safran ont su imposer leur design pour Ariane 6. Ils ont réussi à convaincre l’ensemble de la filière que leur solution basée sur une propulsion liquide était plus modulaire et évolutive que celle proposée par le Cnes basée sur une propulsion solide. Ce faisant, ils s’imposent comme la nouvelle autorité de conception des lanceurs, rôle essentiellement dévolu aux agences spatiales européennes.
Ce nouveau leadership n’est pas sans risque pour les industriels. Airbus Safran Launchers s’est engagé à prendre à sa charge certains développements de la fusée européenne. Il parie également sur des prix de lancement d’Ariane 6 agressifs : 70 millions d’euros dans sa version légère (2 boosters) et 90 millions d’euros dans sa version lourde (4 boosters). De quoi combler significativement l'écart avec SpaceX. Airbus Safran Launchers a enfoncé le clou en dévoilant, il y a quelques jours, une architecture inédite de fusée réutilisable. Si le Cnes et les agences spatiales ont été informés de ces développements, c’est bien les industriels qui sont à la barre.
Hassan Meddah
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