Son cabinet avait prévenu : ce serait un spectacle à l’américaine. Pour ne plus être cantonné à l’annonce de plans sociaux ou au sauvetage d’usines en difficulté, Arnaud Montebourg a lancé le 19 février au soir sa première présentation des "Objets de la nouvelle France industrielle". L’inspiration du ministre, ce sont les conférences Ted ou les keynotes de Steve Jobs.
Il est 20 heures. Le ministre fait son entrée dans la salle sur la musique de Rocky - il faut oser -, monte sur la scène dans la pénombre, sans cravate, micro en main. Devant lui, le centre de conférence du ministère à Bercy est plein à craquer, avec près de 600 spectateurs. Beaucoup d’étudiants, mais aussi des ingénieurs et des chercheurs et des financeurs potentiels pour les starts-ups qui dévoilent leurs produits. Sur la scène, Arnaud Montebourg se lance dans une liste des inventeurs français d’Ambroise Paré à Jérôme Rota, qui a inventé le format de compression vidéo. "Il faut préparer la troisième révolution industrielle", exhorte le ministre en saluant "ces gens qui inventent ces objets du quotidien, ces héros du quotidien inconnus et invisibles".
Stent, cardiaque, biocarburants issus de bactéries, roue motorisée...
Derrière lui, c’est au tour de la start-up Stentys de monter sur scène. Quinze minutes sans notes, micro sans fil sur la tête. Le fondateur Gonzague Issenmann y va de sa petite blague, façon stand-up et show à l’américaine. "Quand j’ai annoncé à mes enfants que j’allais sur la scène de Bercy, ils ont cru que j’allais chanter avec Johnny", se lance un peu hésitant le centralien. Le reste est plus sérieux.
La société créée en 2006 a inventé un nouveau stent, utilisé pour réparer les artères bouchées lors d’une crise cardiaque. En s’adaptant au diamètre de l’artère, le dispositif permet de réduire les risques de complications et de nouvelles crises cardiaques. Sur scène, vidéo et schéma à l’appui, l’ingénieur détaille son innovation, les vies sauvées, les retombées. "Nous avons d’excellents médecins, de bons ingénieurs mais le nombre de medtech reste faible. J’espère vous avoir donné envie de rejoindre ce secteur passionnant", conclut l’inventeur, avec enthousiasme.
C’est au tour de Deinove, qui fabrique des biocarburants grâce à des bactéries "exceptionnelles", jure son co-fondateur Philippe Pouletty, qui prévoit de fabriquer des nano-usines bactériennes où les bactéries digéreront la biomasse pour créer du bioéthanol. "Dès lors que des chercheurs ont une idée, une vision, il ne faut surtout pas écouter les cinquante personnes autour qui diront que ça ne marchera pas", assure Philippe Pouletty, qui a fait une partie de sa carrière en Californie, avant de revenir en France.
Mais si sa société a été financée par son fond Truffle capital et Oséo avant d’entrer en Bourse, l’entrepreneur entend aussi passer un message à Arnaud Montebourg. "Il y a une réforme à faire : flécher 5 % de l’épargne des Français vers les jeunes entreprises innovantes. Si vous le faites, je vous promet que vous aurez des leaders mondiaux", interpelle Philippe Pouletty.
"La France est solide, elle en a vu d’autres"
Derrière les deux start-up, Michelin ferme le bal en présentant sa roue motorisée. Rien d’une start-up. "Le véritable problème du véhicule électrique est qu’il consomme beaucoup. Si nous voulons obtenir une autonomie raisonnable, il faut réduire de 40 % la consommation des véhicules", explique doctement Patrick Oliva, le directeur du développement durable du fabricant de pneumatique, avant de dévoiler dans un coin de la scène les pneus dissimulés derrière de grands draps. "C’est du Mozart pour les ingénieurs", s’extasie-t-il.
Arnaud Montebourg retourne sur scène. "Il y a les mauvais nouvelles, nous y faisons face. Mais il y a les bonnes nouvelles. La France est solide, elle en a vu d’autres", se félicite le ministre, content de son coup de communication assez réussi. La prochaine conférence devrait se tenir en mars, avec trois nouvelles entreprises.
Solène Davesne
21/02/2013 - 20h23 - Sauvepile
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